La vie a repris son cours habituel dans la ville de Bouna. Les populations vaquent librement à leurs occupations. Tel est le constat général que nous avons pu effectuer dans la ville hier mardi 29 Mars 2016.Â
Déjà , à la veille, (lundi de Pâques), la fièvre avait baissé. Certains tenanciers de maquis et restaurants avaient ouvert, signe d’un retour à la normalité, selon un habitant approché. C’est dans une morosité que les activités se déroulent tout de même. A la station d’essence Société atlantique de distribution (SAD), l’agent rencontré nous explique qu’il a ouvert depuis 3 jours. Le hic, les clients arrivent au compte goutte, se désole-t-il. En revanche, la gérante du super marché de cette station nous renseigne qu’elle venait d’ouvrir (Ndlr ce mardi 29 mars) depuis le début des hostilités. Pour la journée d’hier Mardi, caractérisée par la reprise des activités professionnelles, passé les fêtes de Pâques, certaines administrations publiques n’ont pas assuré le service malgré la présence de quelque fonctionnaires , notamment à la paierie générale de Bouna et à la direction régionale des infrastructures économiques. Au niveau du marché central , excepté quelques commerçants installés aux abords, l’activité commerciale dans l’ensemble au marché de Bouna n’a pas encore repris ses droits. Encore sous le choc du fait de leurs magasins pillés et d’autres incendiés, ces acteurs économiques attendent un plan Marshall du gouvernement à en croire le président des commerçants de ladite ville, Kambour Bouna, plus connu sous le nom de Dah Kambour . « Je suis resté bredouille. Mes quatre (4) magasins ont été pillés. L’évaluation que j’ai faite est estimée à plus de 29 millions F CFA. Les autres commerçants ont le même problème. Nous avons demandé aux commerçants de rester calmes. Il ne sert à rien de se faire justice. Il faut laisser les autorités faire leur travail. Nous lançons un appel au Président de la République et à son gouvernement pour reconstruire notre marché. Il nous faut de l’aide, sinon nous souffrons » a souhaité le président de la section de Bouna de la fédération des syndicats et opérateurs économiques de Côte d’Ivoire. La même amertume est constatée chez Mme , Présidente de l’Ong et restauratrice. Elle a repris son activité depuis le mardi 29 Mars après cinq jours de fermeture. Elle a souhaité un retour définitif à la paix et à la cohésion entre les différentes communautés : « Nous avons assez perdu. On essaie de reprendre comme on peu. Notre marché est fermé. Je suis obligée de me rendre à Bondoukou pour me ravitailler. Il faut que la paix revienne et que chacun puisse se déplacer d’un quartier à un autre sans être inquiéter ».Â
Malgré le retour au calme, les murs de méfiance demeurentÂ
Le mercure n’est pas encore tombé entre les différentes communautés ethniques. La méfiance est réelle et les déplacements d’un quartier à un autre sont sources d’inquiétude au dire des habitants interrogés. Kambour Sansan Nestor est le président des jeunes du quartier Gborokirara, habitants d’ethnie majoritairement Lobis. De ses dires, il ressort qu’ils sont persona non grata dans les quartiers Ligbisso et Limansso, où l’ethnie dominante des habitants est le malinké : «Le calme est revenu après les affrontements. Mais il y a encore trop d’inquiétude. Nos frères Koulango et Malinké pensent qu’ils ont eu plus de pertes en vie humaines que nous. Mais c’est une situation qui est pareille pour nous. Nos parents qui sont tombés n’ont pas été comptés parmi les victimes parce qu’il était impossible pour nous de les transporter au centre hospitalier régional (CHR) ou à la morgue. La raisons, c’est que ces structures sont implantées dans un quartier qui leur favorable. Nous étions obligés d’inhumer nos victimes directement dans nos villages. Nous voulons réapprendre à vivre ensemble. Mais si nous mettons les pieds dans leurs quartiers, nous seront agressés ».Â
Sur cette question, Cissé Ibrahim, président de la jeunesse communale de Bouna estime que ces propos ne sont pas le reflet de la réalité. « Depuis la crise, les jeunes lobis de certains quartiers se sont impliqués dans cette affaire de dozo lobi et ont commis des exactions sur nos parents malinké, koulango et peulhs. Certains d’entre eux ont été identifiés et dénoncés à la police. Alors ces derniers ne se sentent pas en sécurité pour les actes qu’ils ont posés. Ils pensent que s’ils s’aventurent au marché où d’autres quartiers, ils seront agressés. Voici ce qui justifie le fait qu’ils ne se déplacent pas librement dans la ville. En ma qualité de président de jeunesse communale, je rassure tout le monde que la circulation est libre et ouverte à tous dans les quartiers Koulango , Malinké et Camara » affirme pour sa part le leader de la jeunesse communale de Bouna. Pour lui, le danger se trouve plutôt du côté des quartiers lobis où existent des dozos qui seraient armés.Â
Ernest Famin, envoyé spécial à Bouna
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