Après une visite à Odienné, Doudou Diène, expert onusien, révèle : « Mme Gbagbo souhaite avoir un membre de sa famille à ses côtés » - « Qu'elle bénéficie de la liberté provisoire »

  • Source: L'Inter
  • Date: jeu. 24 oct. 2013
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Le célèbre juriste sénégalais Doudou Diène, vient d'effectuer une mission de dix jours en Côte d'Ivoire comme expert indépendant des Nations unies sur les droits de l'homme. Une mission au cours de laquelle il a rendu visite à l'ex-première dame de Côte d'Ivoire, Simone Gbagbo à Odienné, dans le nord-ouest du pays. Une rencontre qu'il raconte au micro de Christophe Boisbouvier.

RFI : Au regard des droits de l'homme, qu'est-ce qui va et ne va pas en Côte d'Ivoire ?

Doudou Diène : Ce qui va, c'est qu'en Côte d'Ivoire, après dix ans d'une crise violente, une Commission des droits de l'homme a été créée, les principaux organes de l'État ont été reconstitués sur l'ensemble du territoire. Deuxièmement, il y a un effort considérable pour la formation aux droits des l'homme à la fois de l'appareil sécuritaire d'État, mais également d'un certain nombre d'institutions de l'État.

Maintenant, ce qui ne va pas, ou ce qui doit aller mieux, c'est la reconstitution démocratique est institutionnelle, mais il est extrêmement important qu'elle soit confortée par un pluralisme inclusif. C'est-à-dire faire en sorte que l'autre principal parti d'opposition, le FPI, rentre dans le dialogue politique et participe aux élections. Un effort doit être fait des deux côtés. Un geste a été fait, qui a son importance : la liberté provisoire accordée aux anciens dirigeants détenus.

Quatorze personnalités pro-Gbagbo ont été en effet libérées le 5 août 2013.

J'appelle à une reprise vigoureuse et urgente du dialogue politique, parce que le calendrier électoral risque de tout brouiller. Il y a trois dossiers de nature à renforcer ce dialogue politique, concrètement : la définition consensuelle d'un statut de l'opposition, la réforme de la Commission électorale indépendante qui n'est plus conforme à la situation actuelle, enfin la réforme des listes électorales.

Entre décembre 2010 et avril 2011, les violences post-électorales ont fait quelque 3 000 morts. Est-ce qu'un jour les coupables seront jugés ?

La question qui est peut-être la clé du déblocage du climat politique et du rétablissement de la confiance et de la réconciliation, c'est la question de l'impunité et de l'iniquité de la justice. Les groupes qui recourent à la violence, l'ont fait parce qu'une culture d'impunité s'est installée. Donc, il faut absolument que tous ceux qui ont commis des actes graves se rendent compte que la justice va suivre son cours. Et l'équité, c'est de faire en sorte que tous ceux qui ont commis des violations des droits de l'homme – quelles que soient leurs origines ethniques, leurs camps politiques – fassent l'objet de poursuites.

Une autre dimension de la justice, c'est l'articulation de la justice interne et de la justice internationale. L'ancien président Gbagbo est inculpé actuellement. Et à la Cour pénale internationale (CPI), madame Gbagbo a été inculpée et l'État ivoirien vient de décider légalement d'assumer sa priorité judiciaire. C'est-à-dire que l'État va assumer le jugement de madame Gbagbo que j'ai rencontrée samedi dernier à Odienné. Mais ce jugement suppose que la justice ivoirienne dispose de toutes les capacités nécessaires pour le faire.

Comment va madame Gbagbo ?

Elle a toujours la même vigueur intellectuelle, elle a même une force de caractère qu'on connaît chez elle. Deux ans de détention n'ont pu que l'affaiblir un peu physiquement. Je plaide pour qu'une attention importante soit accordée à ce que ses droits, en tant que détenue, soient pleinement respectés ; droit à la santé, droit à la visite d'avocats… Je pense qu'il serait très important qu'elle bénéficie, dans un premier temps, de la liberté provisoire dont les autres ont bénéficié, et que le jugement puisse se faire dans les meilleures conditions. Il faut aussi qu'elle soit dans un environnement médical qui soit sécurisé.

Ce qui n'est pas le cas à Odienné ?

A Odienné, c'est difficile. Elle est dans un environnement, une villa que j'ai visitée plusieurs fois. Ce n'est pas une cellule. Elle mange, elle a une cuisinière. Elle souhaite qu'un membre de sa famille puisse venir un peu lui tenir compagnie dans sa solitude. Donc, comme c'est un dossier lourd, je plaide que là aussi, pour que son cas fasse l'objet d'un acte symbolique. Je le souligne, parce que nous entrons – la Côte d'Ivoire entre – dans une ère dangereuse, la période pré-électorale. Les élections de 2015, c'est demain.

Sur les quelque 150 personnes inculpées pour les violences post-électorales, une seule appartient au camp d'Alassane Ouattara. Toutes les autres appartiennent au (...)

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