Le ministre Cissé Bacongo : ''Le déblocage des salaires coûte 77 milliards de FCFA à l'Etat''

  • Source: fonctionpublique.egouv.ci
  • Date: mar. 15 sept. 2015
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Dans cette interview qu'il a accordée au journal « Le Patriote », Le Ministre Cissé Bacongo fait le point du déblocage des salaires, du coût de cette opération et de la gestion des fonctionnaires.

LP : Nous allons aborder à présent, Monsieur le ministre, la question de la Fonction publique. Combien de fonctionnaires n'ont-ils pas encore bénéficié du déblocage des salaires ?

CB :A une date très récente, c'était environ 6 400 fonctionnaires qui n'avaient pas pu bénéficier effectivement de l'incidence financière du déblocage des salaires. Sur ces 6 400, 1 600 environ (des enseignants de l'Education nationale) avaient bénéficié de l'effet d'un décret de 2008, reclassant ces fonctionnaires aux grades A3 et A4. Avant ce décret, il y avait des grades intermédiaires A1 et A2, qui ont été supprimés et les enseignants concernés promus aux grades supérieurs A3 et A4. Mais, pour pouvoir bénéficier effectivement des effets du décret, les fonctionnaires visés doivent produire un dossier conformément aux textes en vigueur. Malheureusement, n'ayant pas fait les démarches nécessaires à temps, certains sont restés dans leur grade antérieur dans les fichiers de la Fonction publique. Si nous avions voulu procéder à leur déblocage, nous nous serions basés sur des grades antérieurs qui n'existent plus et aurions créé une injustice. C'est pourquoi, nous avons demandé à Madame le ministre de l'Education nationale d'intervenir auprès des fonctionnaires concernés, afin que nous puissions régulariser leur situation de promotion et faire le déblocage. 4000 autres fonctionnaires sont, globalement, dans les situations inédites. Certains ont deux grades, un grade à la Fonction publique et un autre reconnu à la solde. A titre d'illustration, nous avons reçu une compatriote médecin. Sur son bulletin, elle est classée dans le grade A7 et dans les fichiers de la Fonction Publique, elle est en A4. Sur la base de quel grade devons-nous procéder à son déblocage ? En faisant celui-ci avec le grade A4, nous lui aurions porté préjudice. En débloquant son salaire au grade A7, nous nous serions rendus complices d'une tricherie. D'autres fonctionnaires encore sont enseignants à la Fonction publique et infirmiers à la solde ou attachés administratifs. Ce sont autant de situations cocasses que nous nous employons à régulariser. A la date d'aujourd'hui, beaucoup parmi ces 6 400 personnes ont vu leur situation régularisée. Environ 600 parmi elles ont vu leur salaire débloqué à la fin du mois d'août dernier et un peu moins de 1 000 bénéficieront du déblocage à la fin du mois de septembre.

LP : Combien tout ce processus de déblocage va-t-il coûter à l'Etat de Côte d'Ivoire ?

CB :Le coût du déblocage pour l'année 2015 est de 77 milliards de FCFA. Le processus va se poursuivre, jusqu'à ce que la situation revienne à la normale et que les avancements se fassent conformément aux textes en vigueur, avec les incidences financières correspondantes.

LP : Monsieur le Ministre, que peut-on retenir, au-delà des déblocages, de ce que le Président de la République a fait pour la Fonction publique durant son premier mandat ?

CB :Je l'ai déjà dit dans d'autres circonstances, le Président de la République a déjà tout fait pour la Fonction publique. Il a quasiment tout fait pour les fonctionnaires. D'abord au plan des infrastructures, quand vous arriviez auparavant à la Fonction publique, les bâtiments étaient sombres et tristes, l'environnement insalubre, austère et malsain. Aujourd'hui, en arrivant dans les mêmes locaux, on a l'impression d'être dans une grande banque ou une grande institution internationale. Le bâtiment abritant le cabinet du ministre de la Fonction publique et celui où sont logées la majorité des Directions ont été dotés de halls aménagés et équipés, en vue d'accueillir les usagers dans les meilleures conditions, avec des salons et des téléviseurs. Certes, nous avons procédé à la réhabilitation physique des lieux. Mais en réalité, cette réhabilitation visait à réhabiliter moralement les fonctionnaires. Désormais, les collaborateurs de l'accueil sont en costume derrière leur comptoir comme dans les grandes institutions, après avoir bénéficié d'un minimum de formation à l'ENA. Un code de déontologie et d'éthique est en élaboration ; un code vestimentaire tacite est déjà appliqué. Par ailleurs, nous avons procédé à plusieurs réformes, dont la numérisation des archives. Permettez-moi de faire observer qu'il y a 183 001 fonctionnaires au 31 août 2015 soumis au Statut Général de la Fonction publique. Les dossiers de tout ce personnel sont composés de milliers de papiers (certificat de nationalité, casier judiciaire, visite et contre visite, extrait de naissance, etc.). Depuis 1960, toutes ces archives sont dans le sous-sol, livrées à toutes les intempéries, exposant ceux qui les manipulent à toutes sortes de pathologies. C'est pourquoi, la numérisation de ces archives est d'une importance capitale pour nous, au moins autant que bien d'autres réformes en cours.

LP : Et en ce qui concerne la gestion même des fonctionnaires ?

CB :En arrivant, nous avons trouvé le Système Intégré de Gestion des Fonctionnaires et Agents de l'Etat (SIGFAE). Nous avons renforcé ce système, afin que l'objectif pour lequel il a été créé soit atteint, à savoir qu'on puisse connaître en temps réel, par un clic de clavier, le nombre exact de fonctionnaires et la masse salariale. L'objectif de ce système est d'arriver au FUR (Fichier Unique de Référence), fichier unique à tous les fonctionnaires de Côte d'Ivoire, de quelque statut qu'ils relèvent (statut Général de la Fonction Publique et statuts particuliers applicables à certains fonctionnaires). A partir du FUR, on sera en mesure de connaître le nombre exact de tous les fonctionnaires de Côte d'Ivoire et la masse salariale qu'ils représentent. Ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Mais nous sommes en train d'y arriver avec tout ce que nous avons mis en place. On peut donc dire que le Président de la République a donné tout aux fonctionnaires. Depuis les années 80, le déblocage était attendu. Il est effectif aujourd'hui. A part les personnes citées plus haut, dont les situations ne sont pas encore régularisées, le déblocage est effectif pour les autres fonctionnaires, qui peuvent en attester eux-mêmes. J'en ai même rencontré quelques-uns, des enseignants, qui m'ont demandé d'intercéder auprès du Président de la République, afin qu'ils puissent lui dire merci de vive voix.

LP : Est-ce qu'à ce jour, il y a encore des fonctionnaires fictifs ?

CB :Pour moi, la lutte contre la fraude est une œuvre de longue haleine. C'est un processus quasi permanent. On ne peut pas l'éradiquer de façon effective une fois pour de bon, car il y aura toujours des gens qui feront preuve d'ingéniosité dans le mal. Quand nous sommes arrivés, nous avons trouvé environ 1 231 personnes qui étaient en situation difficile par rapport aux textes, prévoyant les différents modes de recrutement dans la fonction publique, à savoir le concours ou la nomination à titre exceptionnel. Ces personnes n'étaient, ni dans l'un cas ni dans l'autre, mais avaient pu bénéficier de numéro matricule par divers moyens. Le ministre d'alors avait pris des dispositions pour les sortir des fichiers de la Fonction publique. Ce qui les a amenés à se constituer en collectif « Les fonctionnaires ivoiriens en danger », qui a fait le tour des institutions et des grands services de l'Etat. Le ministre avait alors menacé d'intenter une action en justice contre ce groupe de pression. Nous avons affiné les recherches. Elles nous permettent aujourd'hui de dénombrer 2 286 personnes bénéficiant de matricules frauduleux grâce à la complicité de collaborateurs du ministère. J'ai donné instruction afin que ces collaborateurs soient identifiés. Nous avons pu retracer 29 fonctionnaires impliqués dans cette fraude. Ils ont été déjà traduits devant le Conseil de discipline et nous allons les poursuivre au pénal pour faux et usage de faux et complicité en documents administratifs, pour ceux qui seront reconnus coupables, à l'issue de la procédure administrative en cours.

LP : Monsieur le ministre, il y avait des concours d'entrée à la Fonction publique prévus au mois d'août dernier, mais qui ont été reportés. Que s'est-il passé et quelles sont les nouvelles dates de composition ?

CB :Je crois savoir que tout ce qui concerne les concours est sur notre portail (site internet). En général, ce qui peut justifier le report d'un concours, c'est le nombre de dossiers à gérer, les contrôles à effectuer pour éviter que les gens passent à travers les mailles du filet. Il faut effectuer le maximum de vérification pour éviter les fraudes.

LP : On constate aussi aujourd'hui un relâchement dans les horaires de travail. Qu'est-ce qui peut expliquer cela ?

CB :Je ne suis pas certain que ce constat puisse être généralisé. Dans certaines administrations, nous sommes certainement retombés dans les vieilles habitudes. Mais je pense qu'avec tout ce que nous mettons en place comme réformes, nous devons pouvoir éradiquer ces fléaux, c'est-à-dire l'absentéisme, la corruption, les retards récurrents, etc. Nous avons d'ailleurs des émissions télé en vue. A ce sujet, mes services ont travaillé avec les agents de la télévision sur des émissions qui doivent avoir lieu tous les dimanches pour sensibiliser sur la nécessité pour les fonctionnaires et agents de l'Etat d'être à leur poste aux horaires indiqués, d'y rester pendant toute la durée du temps de travail prévu par les textes, d'observer la discipline et de faire preuve d'esprit citoyen dans l'exercice de leurs fonctions. Nous travaillons donc sur la question. Dans les semaines et mois à venir, les Ivoiriens auront l'occasion de voir tout ce que nous avons mis en place pour combattre ces fléaux.




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