Pourquoi Google a préféré revendre Motorola ?

  • Source: Lemonde.fr
  • Date: jeu. 30 janv. 2014
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Un an et demi après avoir acquis Motorola pour 12,5 milliards de dollars, Google jette déjà l'éponge. Mercredi 29 janvier, le moteur de recherche a annoncé la revente du fabricant de smartphones à Lenovo. Le groupe chinois, par ailleurs premier fabricant mondial d'ordinateurs, va débourser 2,91 milliards de dollars. Il devient ainsi le troisième acteur du marché, derrière Samsung et Apple.

La moins-value est considérable pour Google. Elle est cependant inférieure au simple écart entre les deux sommes. Car la société avait récupéré 2,4 milliards de dollars en vendant l'activité de décodeurs de Motorola. Elle a aussi bénéficié des pertes de sa filiale afin de réduire ses impôts. Pour minimiser sa mauvaise opération comptable, Google souligne aussi qu'il va conserver "la vaste majorité" des quelques 17.000 brevets détenus par Motorola. Or, ce sont ces brevets qui avaient motivé cette coûteuse acquisition.

S'exprimant sur le blog de la société, Larry Page, le PDG de Google, n'a pas véritablement justifié la revente de Motorola si ce n'est en assurant que l'équipementier "sera mieux armé avec Lenovo". Il aura certainement l'occasion de s'exprimer plus longuement sur le sujet ce jeudi au cours de la conférence téléphonique des résultats du quatrième trimestre. Mais plusieurs explications peuvent déjà être avancées.

 

1- Une situation financière qui ne s'arrange pas
Ancien leader américain de la téléphonie mobile, Motorola a raté le virage vers les smartphones. Sa part de marché a fortement reculé ces dernières années. Et les pertes se sont accumulées. Pour inverser cette tendance, Google a lancé une restructuration drastique (plus de 5.000 emplois supprimés dans le monde). Il n'a aussi pas lésiné sur les efforts marketing. Mais la situation ne s'est jamais améliorée.

Entre janvier et septembre 2013, Motorola a ainsi accusé une perte opérationnelle de près de 900 millions de dollars. Ses ventes ont continué à s'effriter, alors que ses derniers modèles, le Moto X et le Moto G, n'ont pas rencontré le succès escompté. Selon le cabinet Strategy Analytics, sa part de marché mondiale est tombée en 2013 à 1,4%. Google a, peut-être, tout simplement perdu espoir dans sa capacité à transformer Motorola en entreprise rentable. Il aurait alors préféré arrêter les frais.

2- Simplifier les relations avec ses partenaires
Au sein de Google, Motorola a toujours occupé une position à part. Bien que racheté, le fabricant n'a jamais été intégré au reste de la société. Il a conservé son siège à Chicago, continuant de fonctionner de manière indépendante. Il n'a en outre bénéficié d'aucune synergie avec les autres équipes. Pour Google, il était en effet important de n'accorder aucun traitement de faveur à sa filiale.

Le danger c'était de susciter le mécontentement des autres fabricants de smartphones Android, dont dépend la vitalité du système d'exploitation (OS). En favorisant Mototola, Google aurait pu pousser ses partenaires vers Windows Phone ou d'autres OS alternatifs (Tizen, Mozilla). Les responsables d'Android passaient ainsi une bonne partie de leur temps à assurer qu'ils traitaient tout le monde de la même manière. Ils n'auront bientôt plus à le faire.

3- Favoriser l'émergence de Lenovo
Avec Motorola, Lenovo va devenir le troisième fabricant mondial de smartphones. Sa part de marché reste encore modeste comparée à celle de Samsung et d'Apple: 6% en 2013 contre 32,3% et 15,2% pour ses deux rivaux, selon le cabinet Strategy Analytics. Mais le groupe chinois va gagner un temps précieux sur plusieurs marchés, notamment aux Etats-Unis où Motorola possède déjà des accords avec les grands opérateurs.

Google y trouve également son compte. Lenovo est ambitieux sur le marché des smartphones et des tablettes. Google s'assure qu'il restera dans le camp Android. La firme américaine espère aussi donner à Lenovo les moyens de mieux contrer la montée en puissance des fabricants chinois d'appareils bas de gamme, qui n'incluent souvent pas ses services. Elle souhaite aussi réduire la domination de Samsung, afin de rééquilibrer le rapport de force avec le géant sud-coréen.

4- Rapprochement avec Samsung
Les relations entre Google et Samsung, de très loin le premier fabricant de smartphones et tablettes Android, ont toujours été à double tranchant. Les deux partenaires ont besoin l'un de l'autre. Mais ils sont aussi extrêmement méfiants sur les intentions de l'autre partie. Google par exemple voyait d'un mauvais œil les velléités de Samsung dans les médias (vente de films, chansons...), ainsi que sa volonté de s'émanciper de plus en plus d'Android.

Ce n'est donc certainement pas un hasard si la vente de Motorola intervient au moment où les relations se sont améliorées. Les deux groupes ont conclu en début de semaine un vaste accord sur l'utilisation de brevets. Selon le site Re/Code, Samsung se serait par ailleurs engagé à moins modifier Android et à davantage mettre en avant les services de Google sur ses terminaux. Le rachat de Motorola était aussi un moyen de faire pression sur Samsung. Et Google n'en avait peut-être plus besoin.




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