Reportage / Incursion dans l'univers des anciens drogués : Comment les ex-toxicomanes sont passés du désespoir à l'espoir


(Photo d'archives pour illustrer l'article)
  • Source: L'Inter
  • Date: sam. 11 juil. 2015
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Depuis plus d'une décennie, il accueille toutes ces personnes, enfants comme grands qui se sont retrouvées volontairement ou non, en marge de la société. Le centre Remar, reste depuis lors fidèle à son credo : accepter tout le monde, ne rejeter personne.

Drogués, prisonniers, prostituées, enfants de la rue, sont nourris, hébergés, éduqués et évangélisés par de bonnes volontés, dont certaines ont elles-mêmes été des parias. Incursion dans cet univers où la foi transfigure les damnés en honnêtes citoyens.

Vendredi 1er mai 2015. Il est 9h, quand nous arrivons devant le siège de l'Ong Remar à Yopougon Selmer. En face du bâtiment blanc, trône un panneau qui résume à lui seul la raison d'être de l'établissement : ''Ong Remar, centre chrétien de réhabilitation, non à la drogue, oui à la vie''. « Est-ce bien vous, la journaliste avec qui nous avons rendez-vous ?» demande l'air radieux, l'un des trois hommes présents dans la salle où nous avons été dirigée. C'est M. Kouao Simplice Casimir, chargé d'études et de projets du centre. Il présente avec beaucoup d'entrain l'établissement. Le Centre chrétien de réhabilitation Remar Côte d'Ivoire, dira t-il, est une Organisation non gouvernementale (Ong.). « Nous travaillons pour la réhabilitation et la réinsertion des drogués, des prostituées, des prisonniers, des déplacés de guerre, des enfants de la rue, des orphelins, des alcooliques et des nécessiteux en général ». Cette Ong est née en 1982, à Victoria en Espagne, dans la banlieue madrilène, sous la houlette du président-fondateur Paul Miguel Diez, lui même un ancien toxicomane. Le Burkina Faso a été le premier centre chrétien en Afrique de l'ouest. En 1996, sept missionnaires quittent Ouagadougou pour Abidjan, pour non seulement évangéliser, mais apporter des soutiens moraux. Le Remar compte plus de 600 pensionnaires, la plupart des enfants sont pris en charge gratuitement dans les différents centres que sont : Yopougon, Anyama, Yamoussoukro, Attinguié, Daloa, San Pedro et Aboisso. L'établissement dispose également d'une ''maison d'enfants'' à Anyama qui héberge environ 150 pensionnaires issus des quartiers précaires. Les actions du centre s'étendent aussi aux prisonniers. Le Remar distribue trois repas par semaine aux détenus en traitement à l'infirmerie de la Maca soit un total de 13. 650 repas servis par semaine. Aujourd'hui, ce sont au total 16 centres que Remar a installés sur le territoire ivoirien, avec chacun un cahier de charges bien précis.

 

L'évangile pour éviter l'asile

Il y a des centres de première phase qui accueillent les drogués de tous milieux ( prison, ghetto, foyers, et fumoirs). Les établissements, qui hébergent ces rebuts de la société, sont reculés de la ville. L'objectif est de les isoler afin de les couper totalement de la drogue et des vices auxquels ils s'adonnaient. C'est la phase de la ''désaccoutumance''. La 2ème phase est spirituelle, elle est appelée ''l'école des disciples''. C'est ici que commence l'évangélisation des ex-drogués, leur ''rencontre avec Dieu'' . La 3ème phase consiste à préparer le postulant à se réinsérer dans la vie sociale et professionnelle. La porte s'ouvre à nouveau, c'est un homme grand, d'une soixantaine d'années aux cheveux grisonnants qui apparaît. Il est parfaitement informé de notre visite. C'est le responsable du magasin où sont exposés les objets fabriqués par les pensionnaires. On y trouve toutes sortes d'objets : Sacs, chaussures, berceaux et bien d'autres. De ce mini-market, on aperçoit un groupe d'enfants passer, ballon de foot en main. C'est certainement la récréation pour ces jeunes pensionnaires. L'un d'eux lance un défi : « Nous allons vous gagner aujourd'hui! ». Le responsable du magasin ordonne à deux jeunes gens de faire venir des chaises. Alors qu'ils voulaient se retirer, il les invite à prendre part à la conversation, ils acceptent et prennent place timidement. Ils étaient bien habillés. A quatre autour de la table, le solide quinquagénaire décline son identité. Ironie du sort, cet homme bâti comme une statue de pierre sculptée au burin, dit s'appeler Rock, il est Béninois, marié et père de deux enfants. Il avoue avoir été un invétéré toxicomane, tout comme les deux garçons présents à ses côtés. Rock ne s'est pas arrêté à cette petite confidence, il a déballé son passé d'addict à la drogue. Aucune drogue n'a de secret pour lui. Du chanvre indien à l'héroïne, en passant par la cocaïne, il avoue avoir tout essayé. Il affirme fumer au début pour ''avoir de l'inspiration'' afin de bien exercer son métier d'enseignant. Mais après, il en a pris goût et fumait pour le plaisir. Mais au fur et à mesure, la drogue s'imposait à lui comme une nécessité, une obsession. Tant qu'il n'en trouve pas, il devient malade et fait tout pour s'en procurer, allant jusqu'à voler de l'argent pour pouvoir satisfaire son envie. Il observe un silence et pousse un soupir. On comprend clairement qu'il a une autre confidence à faire. L'ancien accroc à la drogue affirme qu'au début, c'est le chanvre indien qu'il fumait. Mais la très forte odeur du tabac n'échappait pas à son épouse qui a fini par s'en rendre compte. C'est ainsi qu'on lui conseille dans le milieu d'essayer un autre stupéfiant, celui-ci est totalement inodore et ne laisse transparaître le moindre signe visible chez le consommateur. Rock se laisse convaincre des ''vertus'' de cette drogue qui entraîne le consommateur dans un autre univers, une sorte de nirvana, tout en ayant les pieds sur terre. Mais la cocaïne coûte cher. ''J'ai commencé à tout brader pour s'en acheter. Plus j'en consommais, plus j'en avais envie '', confesse le drogué repenti qui reconnaît que cette drogue censée entraîner son consommateur dans un univers féerique, est en fait un couteau à double tranchant. Les conséquences sont terribles, reconnaît Rock. « La cocaïne et l'héroïne sont des drogues dures, donc très dangereuses, qui vous détruisent psychiquement et physiquement », soutient-il, avant de révéler les conséquences que la drogue a commencé à avoir sur sa santé. « J'étais malade, je crachais du sang, je pensais même que j'avais un cancer ». L'ancien pensionnaire de Remar avoue que les médecins ont tout fait, pour le soigner, mais le mal persistait, jusqu'au jour où il entendit parler de Remar.

 

Le temps de la délivrance

C'est ainsi qu'en 2002, il est conduit au Ghana, où Remar dispose d'une maison d'accueil des drogués. « C'est la providence qui m'a fait découvrir ce centre, c'est là que Jésus Christ va transformer ma vie par sa parole et par la puissance de son sang», affirme Rock. L'ancien addict à la drogue se lance dans un émouvant témoignage. Il évoque, quasiment sur un ton de prêche, le miracle dont il venait de bénéficier. Il soutient que là où la science des médecins et autres psychiatres et psychologues a montré ses limites, la puissance de Dieu s'est manifestée. Deux hommes de race blanche firent irruption dans la boutique du centre. Ce sont sûrement des clients. Rock interrompt subitement la conversation au motif que s'il devait continuer, même une journée entière ne suffirait pas. Il nous confie donc aux deux jeunes gens qui sont aussi des toxicos repentis et fonce vers les deux hommes qui étaient déjà dans les rayons. Un peu crispés au début, Loïc, élève en classe de 3ème et Ange Patrick en seconde, tous deux ''sauvés de la drogue par le Christ'' se mettent vite en confiance et déballent comme leur ''papa'', leur vie ancienne. Comme Rock, ils ont été des inconditionnels de la drogue. Ils ont eux aussi été des rebuts de la société. Mais leur entrée au Remar va les transformer. Jamais auparavant, ils n'avaient vécu en communauté. C'est une ferme située à ''8 kilos'', sur la route de Bonoua, qui les accueille. Hormis l'élevage de porcs et quelques travaux champêtres, l'isolement du coin ne permet aucune autre occupation aux nouveaux venus, que la prière et la méditation. C'était la seule façon pour eux de venir à bout du '' diable et de la drogue'' . A l'issue de cette première étape qui a duré trois mois, l'heure était venue aux deux jeunes gens de quitter ce ''purgatoire'' pour aller à ''l'école des disciples'' C'est cette seconde étape qu'ils poursuivent actuellement à Remar Yopougon. Cette étape se déroule dans les différents centres des zones urbaines de la Côte d'Ivoire. Loïc et Ange Patrick se disent métamorphosés, après avoir été évangélisés et prêts désormais à reprendre une vie normale. Retour dans la salle principale, après ce détour au magasin. Simplice Houa nous attend pour visiter les lieux. Mais voila que la porte s'ouvre et laisse entrevoir un homme visiblement soucieux, accompagné d'un jeune garçon. Apparemment, c'est un père qui a conduit son fils au centre. C'est Emmanuel qui les reçoit. Le géniteur de ce garçon l'y a amené pour voir ce qui pourrait être fait pour le sauver de la drogue. Le responsable qui a tenu à s'entretenir, seul à seul, avec le jeune homme, prie son père de s'éloigner. Mais visiblement, le garçon ne parle que l'anglais. Las d'avoir tout fait pour lui arracher quelques mots français, Emmanuel se résout à recourir à un interprète. Il sollicite un autre drogué. Le garçon se met alors à rire. On comprend alors qu'il s'adonnait à une farce. Il prend un air sérieux et c'est plutôt lui qui soumet Emmanuel à un interrogatoire. Ce dernier fait revenir le père du jeune et lui fait comprendre que son fils ne pourra pas être accept&ea (...)

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