Le 27 janvier 2014, il déclarait officiellement sa candidature à l'élection présidentielle de 2015 en Côte d'Ivoire. Il s'agit de Martial Ahipeaud, président de l'Union pour le Développement et les Libertés (UDL). Le jeudi 6 février 2014, il nous a accordé une interview dans laquelle il explique tout. Interview première partie.
Linfodrome: Vous vous êtes déclaré candidat à l'élection présidentielle prochaine, en 2015. Pourquoi maintenant, et non en 2010 ou 2020 ?
Martial Ahipeaud: En septembre 2009, j'avais été arrêté par un complot international en Libye pour m'empêcher d'être candidat en 2010. Donc au niveau du parti, nous avions pris la décision d'être sur la ligne de départ en 2010. Malheureusement le complot de Tripoli et la mauvaise foi manifeste de la Commission Électorale Indépendante (CEI) nous en a empêché. Aussi, nous avons constaté que depuis trois ans, il y a une espèce de chantage émotionnel politique qu'ils exercent sur l'ensemble de la classe politique. Il était important que nous, ayant lutté pour la démocratie depuis 1990, interpellions la classe politique que le parti unique c'est bel et bien terminé, et qu'on ne pourrait pas accepter, 25 ans après, qu'on veule nous situer dans un contexte de candidature unique. C'est un. Et deuxièmement, nous considérons que les conditions dans lesquelles les Ivoiriens vivent sont extrêmement difficiles. Il est important que nous engagions, dans un troisième temps, le débat sur les questions de fond. Ce sont là les trois raisons qui nous ont motivé à annoncer notre candidature à la suite de celle du président lui-même. Nous ne faisons que suivre son exemple sur ce point précis.
Linfodrome: Vous parlez du Président Ouattara. Quelles sont vos chances devant ces ténors ? Votre candidature n'est-elle pas pour amuser la galerie ?
M.A: Ceux que vous appelez les ténors sont ceux que nous avons qualifiés des héritiers du système néo-patrimonial dans lequel nous sommes. Je pense que techniquement, aujourd'hui, les Ivoiriens ont largement apprécié leur gestion qui s'est soldée par une crise post-électorale qui a fait des milliers de morts. La problématique est de savoir est ce que le peuple de Côte d'Ivoire est prêt à subir cette situation une fois de plus. Le samedi dernier (ndlr 1er février), j'étais en réunion avec une vingtaine de jeunes qui s'organisaient pour la recherche de leur premier emploi. Certains, c'est depuis 2000, 2001, 2004. Il y a une espèce de désespérance de l'ensemble de cette jeunesse et aujourd'hui, il faut qu'on ait des gens à la tête du pays qui s'occupent des Ivoiriens, en lieu et place de s'enrichir eux-mêmes.
Linfodrome: N'est-ce pas un ballon d'essai que vous lancez pour mesurer votre côte de popularité au sein de la population ivoirienne ?
M.A: Absolument pas. C'est parce que nous savons aujourd'hui l'état de mécontentement de la population que nous lui lançons un message fort, pour dire qu'il y a une alternance possible, qu'elle est politique, idéologique et générationnelle. Politique parce qu'elle se veut celle de la mise à mort de la deuxième république, celle des héritiers guerriers. Elle est idéologique parce qu'elle est fondamentalement celle d'une vision profondément démocratique de la société. Et elle est générationnelle parce qu'aujourd'hui, on sait que la plupart des amis de notre génération sont à des postes de direction de l'État. Ce sont eux qui soutiennent l'État aujourd'hui, mais qui, malheureusement, ne voient pas leurs aspirations à une modernité, une gestion cohérente, une gouvernance moderne de la république, voir le jour. A partir de ce moment, nous disons que nous ne sommes pas là pour amuser la galerie. Pour ceux qui nous connaissent, ils savent que quand nous avons toujours posé des actes, c'est par rapport à une conviction et notre détermination. On verra sur le terrain ce que cela donnera. Mais ce que je peux dire, c'est qu'il y a eu un sondage qui a montré que 49% des Ivoiriens ne se reconnaissent pas aujourd'hui dans ce que vous appelez les trois principaux partis.
Linfodrome: Vous parlez de génération passée et de la vôtre qui doit venir, la génération fesciste qui s'annonce surtout pour l'après 2015...
M.A: (Il me coupe). Je veux juste corriger une chose très importante. Il y a eu plusieurs générations de leaders dans cette nation. Il y a eu celle de William Ponty conduite par le président Houphouët, ensuite de l'aventure 1946 qui est un peu la génération des gens de la FEANF, de l'UNECI. La troisième grande génération est celle des Méécistes qui s'est associée à la gestion du pouvoir des deux précédentes qui se retrouvent aujourd'hui face à une situation catastrophique. Notre génération est venue au travers du mouvement qui est la FESCI. C'est une loi naturelle de succession. Ce n'est pas parce que nous avons voulu sauter les générations ou ne pas permettre aux générations qui ont géré de le faire. En réalité, nous sommes venus largement après les indépendances. Ceux qui ont géré jusqu'à aujourd'hui sont généralement nés avant l'indépendance.
Linfodrome: La FESCI s'est illustrée de mauvaise manière. Elle n'a pas une bonne presse auprès de la population ivoirienne chez qui elle évoque la violence, les machettes, les gangs, etc. Pourtant vous traitez les dirigeants des autres générations de guerriers. Pensez que votre génération est un modèle à même de pouvoir diriger la Côte d'Ivoire ? Qu'elle sera acceptée par les Ivoiriens qu'elle a traumatisés ?
M.A: En premier point, je dirai que je n'ai pas envie de faire des leçons de morale aux uns et aux autres. En deuxième point, c'est ce que tout le monde connaît l'histoire de la FESCI. Il y a une génération qui a créé et dirigé cette organisation, qui s'est battue et qui s'est formé scientifiquement et qui représente aujourd'hui l'épine dorsale de l'État, de la nation dans tous ses compartiments. Cette génération est à différencier avec celle de la guerre des machettes qui, il faut le souligner, a été instrumentalisée par les aînés pour leurs objectifs politiques. La guerre des machettes et les dérives qu'il y a eu par la suite ne sont pas fondamentalement en dehors de la procédure de la lutte interne que la génération que nous suivons à organiser depuis les vingt dernières années. Souvent, on accuse les jeunes, mais en réalité et on ne met pas la main ou le doigt sur ceux qui sont derrière eux. À partir de ce moment, je pense qu'il faut relativiser. Ce n'est pas celui qui est l'instrument qu'il faut condamner mais celui qui est le manipulateur. C'est pour cela que nous considérons que ces manipulateurs qui sont derrière, qui ont marqué le pays d'une manière particulière, se doivent d'assumer les conséquences de leur propre histoire. C'est-à -dire se rendre compte qu'ils ont échoué entièrement et prendre les rênes du pouvoir pour effectivement donner une autre dynamique à notre pays. Je ne crois pas que ce soit les jeunes qui, à cette époque n'avait aucun moyen. Si vous prenez l'exemple de ceux qui se sont devenus les leaders de la rébellion, ce ne sont pas eux qui avaient financé à coup de milliards cette rébellion. Vous comprenez très bien qu'il y avait des gens derrière.
Linfodrome: Tout est une question d'idéologie. On ne peut pas forcer quelqu'un à faire ce qu'il n'aime pas, une chose dans laquelle il ne se retrouve pas. N'est-pas parce que ces personnes ont accepté l'idée de la violence qu'elles s'y sont jetées ?
M.A: Je suis parfaitement d'accord avec vous. Ce que je suis en train de dire est qu'il ne faut pas pas blâmer les conséquences et laisser de côté la cause. Si on considère, qu'effectivement, il y a eu des dérives au niveau de la jeunesse, il faut qu'on accepte aussi de dire cette jeunesse-là était des instruments, des porte-couteaux des gens qui étaient plus forts, des seigneurs de guerre. Ça ne disculpe pas éventuellement ces camarades-là . Bien au contraire ! Je pense que chacun a pris ses responsabilités en fonction de ses convictions. C'est pour cela que nous autres, beaucoup des camarades de notre génération, on ne s'est pas retrouvé en train d'être des capitaines ou des commandants de guerre. Parce qu'on n'a pas considéré que c'était là notre destin. Évidemment, chacun assume son histoire, mais dans le fond, il ne faut pas que les histoires soient lues de façon linéaire mais globale.
Linfodrome: Vous voulez donc dire que votre génération est à même de diriger la Côte d'Ivoire
M.A:
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