Politique

Procès à la CPI / Fatou Bensouda : « Nous avons obtenu de nombreux éléments de preuve contre ces deux accusés »
« Vous allez entendre des hommes politiques, des membres des ex-FDS, des membres des jeunes pro-Gbagbo... »

post-img
Fatou Bensouda dit avoir des éléments de preuve contre Gbagbo et Blé Goudé.

La Procureure de la Cour pénale internationale (Cpi), Fatou Bensouda, a rappelé ce qu'elle reproche à Laurent Gbagbo et à Blé Goudé, dans sa déclaration liminaire. Elle s'est exprimée d'abord en français, puis en anglais, ce jeudi 28 janvier 2016, à l'ouverture du procès des deux Ivoiriens à La Haye.

Messieurs les juges, Mesdames les juges, M.M. Laurent Gabgbo et Charles Blé Goudé doivent répondre de crimes contre l'humanité, meurtres, viols, atteintes graves et persécutions commis à Abidjan à la suite des élections présidentielles qui se sont tenues en Côte d'Ivoire en 2010. Que les choses soient soient bien claires dès le départ : cette affaire ne s'agit pas de déterminer qui a gagné les élections en 2010 ni qui a aurait dû les remporter. Il s'agit d'établir la responsabilité pénale individuelle de deux accusés pour ce qui est des crimes commis, dans la cadre des violences post-électorales de 2010 qui relèvent de la compétence de la Cour pénale internationale. Il s'agit d'établir leur responsabilité au sujet des crimes commis par les forces armées de la Côte d'Ivoire, ainsi que par des groupes de jeunes, des milices et des mercenaires en exécution d'un plan visant à maintenir coûte que coûte Monsieur Laurent Gbagbo au pouvoir, principalement, en raison de la crise politico-militaire en Côte d'Ivoire 2002-2007. Les élections de 2010 ont été les premières élections qui se sont tenues au cours des 10 années où Monsieur Gbagbo était au pouvoir. Elles devraient marquer l'unité du pays. Mais ce ne fut pas le cas. Enfin, pendant 5 mois environ. Du 27 novembre 2010 au 12 avril 2011, la Côte d'Ivoire a sombré dans le chaos. Et a été le théâtre de violences (...) déclenchées par des discours de division (…). Tous les autres étaient qualifiés d'ennemis de la République. Monsieur Laurent Gbagbo n'a pas eu l'intention d'abandonner le pouvoir. Il s'était préparé à l'éventualité d'une défaite électorale en posant ses fondations du recours à la violence. Puis, lorsqu'il a compris que la présidence allait lui échapper et avec l'aide de son entourage immédiat, il a lancé une campagne d'attaque orchestrée contre les civils assimilés à ses opposants. D'abord, les partisans de l'opposant politique de Monsieur Gbagbo, Monsieur Alassane Ouattara. Ensuite, tous ceux qui étaient considérés comme acquis à la cause de ce dernier compte tenu de leurs origines ethniques, de leur religion ou de leur nationalité. Ou encore de ses trois critères à la fois. Le groupe ethnique comme les dioulas, généralement de confession musulmane, et les Ivoiriens d'origine ouest-africaine ou les citoyens des pays d'Afrique de l'ouest comme le Mali et le Burkina Faso, ont tous été considérés comme des partisans Monsieur Ouattara. Les membres de ces groupes ethniques nationaux et religieux ont tous été pris pour cibles lors des manifestations politiques, à des barrages routiers et dans des communes les plus peuplées d'Abidjan comme celle d'Abobo. Leurs foyers et les marchés qu'ils fréquentaient ont été bombardés et leurs édifices religieux attaqués. Monsieur le président, Mesdames les juges, Messieurs les juges, au vu des éléments de preuves qu'elle a requis, l'accusation est aujourd'hui pour poursuivre deux hommes, Monsieur l'ancien président de la Côte d'Ivoire et Monsieur Charles Blé Goudé, allié de longue date de Monsieur Gbagbo et chef de file des jeunes partisans de ce dernier qu'il a nommé ministre de la jeunesse, de la formation professionnelle et de l'emploi, après les élections.

 

Envoyer un message fort 

Nous sommes ici, aujourd'hui, pour envoyer un message fort et ferme à tous ceux qui complotent pour se hisser au pouvoir ou s'y maintenir en ayant recours à la force et à la brutalité à savoir qu'ils doivent répondre et répondront de leurs actes conformément aux dispositions de statut de Rome.

Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les juges, nous sommes ici présents pour rappeler au monde que des crimes tels que ceux mêmes qui sont au cœur de cette affaire, le meurtre, le viol, les actes inhumains, la persécution, des crimes contre l'humanité, menacent la paix, la sécurité et le bien-être non seulement des communautés touchées mais de toute l'humanité. Quiconque commet une violence de masse le fait contre le monde entier. Et, j'aimerais réitérer quelque chose. La force motrice de ce procès n'est pas la considération politique. Notre mandat est un mandat strictement juridique en application du statut de Rome. Nos enquêtes indépendantes nous ont permis de recueillir des éléments de preuve. Ce qui fait que notre objectif est de poursuivre pour les crimes qui ont été commis pendant une période de violence post-électorale qui a détruit et anéanti des vies de tant d'hommes, femmes et enfants en Côte d'Ivoire. Nombreux sont les Ivoiriens qui suivront de très près ce procès et d’aucuns se demanderont pourquoi l'accusation a accusé ces deux hommes et non pas d'autres pour le moment. L'accusation s'est engagée fermement à s'assurer que toutes les personnes les plus responsables pour la violence, qui a été déchaînée contre les civils en Côte d'Ivoire dans le cadre des élections de 2010, seront traduits en justice. Selon les rapports, 3.000 civils ont été tués, lors de la violence post-électorale dans le pays par les forces armées des deux côtés. Nos enquêtes dans le pays continuent. Mais elles vont prendre un certain temps et j'encourage la population de la Côte d'Ivoire à faire preuve de patience et j'exhorte les autorités nationales à continuer à coopérer avec mon bureau, dans le cadre de ces activités. Mon bureau va s'efforcer d'assurer et de garantir la justice et la responsabilité pour tous les camps. Cela doit être clair. Car, mon bureau est en train de mener des enquêtes et ce, dans les deux camps du conflit. C'est ce qui est exigé par le mandat juridique du bureau. C'est ce que mérite les victimes et c'est ce que l'accusation s'est engagée à faire. Et c'est pour cela qu'elle œuvre en ce moment. Comme vous l'expliquera Eric McDonald, le premier substitut du procureur dans l'affaire, dans le deuxième volet de la déclaration liminaire. L'accusation va prouver au-delà de tout doute raisonnable que la responsabilité pénale individuelle peut-être imputée à Messieurs Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé pour des crimes contre l'humanité qui ont été commis contre des civils à Abidjan, entre le 27 novembre 2010 et le 12 avril 2011. L'accusation va prouver que Monsieur Laurent Gbagbo et Monsieur Charles Blé Goudé et d'autres membres de l'entourage immédiat de Monsieur Gbagbo ont concocté et mis en œuvre un plan commun et ce, enfin de garder au pouvoir Monsieur Laurent Gbagbo par tous les moyens.

 

Recours à la force armée et à la violence 

Ces moyens incluaient le recours à la force armée et à la violence (…) Ces moyens incluaient également une politique qui consistait à lancer une large attaque. Une attaque systématique contre les civils qui étaient perçus comme étant des sympathisants de Monsieur Alassane Ouattara. Comme cela vous sera expliqué, cette politique a abouti à la commission de crimes dont sont accusés les deux accusés en application du statut de Rpme. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les juges, je commencerais par l'accusé Monsieur Laurent Gbagbo. À partir du moment où monsieur Laurent Gbagbo a (été élu) après les élections présidentielles de 2000, son intention était de rester au pouvoir coûte que coûte par tous les moyens. Et cela incluait le recours à la violence comme les événements des élections présidentielles de l’année 2010 en Côte d'Ivoire le démontreront. Il s'est appuyé sur des lois discriminatoires pour empêcher ses opposants politiques à se présenter à ces élections. Il a signé des traités de paix mais à entravé leur mise en œuvre. (...)



Lire la suite sur Soir Info


professionnelle Côte d'Ivoire monde application don Abidjan Afrique jeunes femmes religieux Laurent Gbagbo Alassane Ouattara Charles Blé Goudé Fatou Bensouda Abobo La Haye Mali Burkina Faso Cour pénale internationale Cpi présidentielle emploi élections procès fondation formation Ivoirien permis

Articles similaires