L'on a coutume de dire qu' « un haut serviteur de l'Etat, çà la ferme ou ça démissionne ». Qu'est-ce qui n'a pas marché chez Francis Wodié pour qu'il démissionne de son poste de président du Conseil constitutionnel de Côte d'Ivoire?
La question demeure, la soif d'en savoir davantage aussi. L'acte posé par l'éminent professeur de droit constitutionnel ne saurait passer pour banal. Il est inédit dans une Afrique où tous s'accordent à penser, voire à dire que la démission n'est pas des habitudes des hauts cadres, serviteurs de l'Etat. Celle que vient d'effectuer le Pr. Wodié va susciter beaucoup de commentaires et peser dans le jeu politique ivoirien. Tant, sa démission suscite interrogations, incertitudes sur les challenges à venir et inquiétudes.
Départ forcé ou démission volontaire? En quittant le Conseil constitutionnel, à moins de 9 mois des prochaines échéances électorales, Francis Wodié ne fait pas du bien au président de la République, Alassane Ouattara. Il met le chef de l'Etat, qui s'est déclaré candidat à sa propre succession, dans une posture inconfortable.
Le Conseil constitutionnel, faut-il le rappeler, est l'organe chargé de valider les candidatures, en amont, et les résultats qui sortiront des urnes. Le départ précipité et inattendu, à l'approche des échéances, du président de cette institution, juge suprême et gardien de la Constitution ivoirienne, ne peut qu'être symptomatique d'un malaise au sommet. Une situation qui n'est pas faite pour consolider la position du président de la République, qui l'a nommé.
L'acte de Francis Wodié oriente les regards vers des faits majeurs de sa vie institutionnelle, qui n'aura duré finalement qu'un peu plus de trois ans sur les six qu'il devait passer. Entre autres faits, il y a les conditions de sa nomination, qui ont suscité beaucoup de récriminations entachant sa légitimité à la tête de l'institution. Son prédécesseur, ayant été débarqué avant terme malgré son repentir en 2011, alors que sa nomination lui valait un mandat inamovible de 6 ans, selon les dispositions constitutionnelles. Le président Ouattara tient sa légitimité, en effet, de Paul Yao N'dré, qui après avoir investi Laurent Gbagbo, dans un premier temps, a reconnu publiquement son erreur et s'est corrigé le 5 mai 2011 par l'investiture officielle de l'actuel tenant du pouvoir. En le démettant avant terme pour le remplacer par le Pr. Wodié, la nomination de l'ex- président du Parti ivoirien des travailleurs (Pit), devenu son allié au 2nd tour de l'élection présidentielle de 2010, n'a pas reposé sur des bases juridiques solides. Toute chose qui mettait le concerné déjà dans une posture inconfortable.
Â
Le débat sur l'éligibilité et les vieux démons
Mais, le véritable hic - et il faut avoir le courage de le dire -, c'est que ce départ précipité de Francis Wodié du Conseil constitutionnel cache mal ou éveille dans des esprits un débat latent qui se mène, pour le moment en sourdine dans des officines politiques en Côte d'Ivoire. Il s'agit de l'éligibilité, sinon de la rééligibilité du président Ouattara. Une question que nul n'ose aborder de façon frontale mais qui commence à émerger avec la démission forcée ou volontaire du gardien du temple constitutionnel.
En effet, pour certains acteurs politiques et bien des observateurs de la place, l'actuel chef de l'Etat ne saurait prétendre à un 2nd mandat à la tête de la Côte d'Ivoire, eu égard aux dispositions juridiques en vigueur. Les tenants de cette thèse se réfèrent encore à l'article 35 de la Constitution sur l'& (...)
Lire la suite sur L'Inter
Côte d'Ivoire Afrique Laurent Gbagbo Alassane Ouattara Francis Wodié jeu élection présidentielle candidatures Conseil constitutionnel ivoirien