Heureux comme Youssouf Bakayoko, « libéré » des pesanteurs de la Commission électorale indépendante (Cei). Il dit, avec une joie feinte, « partir avec la tête haute et la conscience tranquille ». De blanc vêtu dans une chemise à bras de manche (manches longues), assis seul dans un immense canapé couleur jaune ocre, il nous reçoit, sourire jusqu'aux oreilles, ce vendredi 4 octobre 2019. La rencontre a lieu dans sa résidence fortement protégée de Marcory résidentiel, à un jet de pierre de celle de Guillaume Soro, ancien président de l'Assemblée nationale.
Le désormais ancien président de la Commission électorale indépendante (Cei) la télécommande de son « home cinéma » en main, zappant d’une chaîne d’info à l’autre, semblait, visiblement, à son aise dans sa nouvelle situation. Youssouf Bakayoko a officiellement quitté la présidence de la Cei, le mercredi 2 octobre 2019, après avoir cédé le fauteuil à Ibrahime Coulibaly Kuibiert au cours d'une cérémonie de passation de charges au siège de l’institution aux Deux Plateaux. Vu le contexte dans lequel il est parti de la tête de la Cei, qu’il a présidée pendant 9 ans (3 ans pour finir le mandat de Robert Beugré Mambé) et 6 ans au titre de son mandat, il se targue, néanmoins, d’avoir organisé 8 élections qui ont connu des fortunes diverses. Mais, globalement, il en tire un réel motif de satisfaction…
« Pendant 9 ans, j’ai installé les institutions de la République, qui sont reconnues de tous. En 2010, les acteurs politiques ivoiriens ont accepté, de plein gré, que l’Onu certifie les élections en Côte d’Ivoire. Et nous avons travaillé en fonction du droit et des lois ivoiriennes ainsi que des règlements et accords internationaux », fait-il remarquer. Pour se dédouaner de tout reproche, le membre du Bureau politique (Bp) du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (Pdci) rend responsable certains acteurs politiques « qui refusent de respecter les règles du jeu démocratique ». Pour ce qui concerne le Pdci, son parti, il se surprend de sa présence sur la liste des membres du Bp, « lui qui n’a pas payé, depuis 9 ans, ses cotisations ». Mais il ne s’en plaint pas et ne blâme personne. Aujourd’hui, l’homme est heureux comme un poisson dans l’eau, et retrouve, avec une vive satisfaction, sa pleine liberté de parole…Et l’ancien député, puis maire de Séguela en use, abondamment, ce soir-là avec nous.
Sur le chapitre de la politique intérieure, relativement à la posture de l’opposition sur la question de la Cei, Yousouf Bakayoko estime que « l’opposition n’est pas en mesure de remporter un rapport de force avec le pouvoir ».
Révélations sur Faki Mahamat…
« Dans tous les pays au monde, le parti au pouvoir a plus de force que l’opposition, sur tous les plans et à tous les niveaux. Voyez en France, le mouvement des Gilets jaunes est en train de s’essouffler. Moi, je suis diplomate de carrière. Je ne sais si les gens de l’opposition comprennent que ce n’est pas l’Union africaine (Ua) qui viendra régler leur problème. Ils ont écrit au président de l’Union africaine. Mais, Abdel Fattah al-Sissi, président en exercice de l’Union africaine, leur a répondu par l’entremise du président de la Commission de l’Union africaine, le Tchadien Moussa Faki Mahamat. D’ailleurs, concernant M. Mahamat, je vais trahir un secret. Je le connais très bien, ce monsieur. Quand j’étais ministre des Affaires étrangères de Côte d’Ivoire, il était ministre des Affaires étrangères du Tchad. Lorsque je suis allé en mission au Tchad, il m’a invité à déjeuner chez lui. Pendant que nous étions à table, il me lance : « Monsieur le ministre, est-ce que vous savez que j’ai des racines ivoiriennes ? « Non ! », ai-je répondu. Et, il ajoute : « En fait, je veux dire que j’ai grandi en Côte d’Ivoire avec mes parents qui sont installés à Azaguié, route d’Adzopé. Je peux donc me considérer comme un Ivoirien », confie-t-il en souriant.
L’ex-président de la Cei ne manque pas de nous avouer son « entonnement profond » face à cette information de son ex-homologue tchadien sur ses liens avec la Côte d’Ivoire. Youssouf Bakayoko ne fait pas de lien direct entre la récente sortie du président de la Commission de l’Ua sur la Cei, en pleine controverse, mais laisse sous-entendre que l’hypothèse d’une anguille sous roche n’est pas à exclure… C’est pourquoi, insiste-t-il, « il faut que l’opposition compte sur ses propres forces. Il faut qu’elle s’organise sur le terrain, s’implique dans le recensement ». Car, poursuit-il, « ce n’est pas Al Sisi qui viendra demander des comptes sur la Cei à son homologue chef d’État, Alassane Ouattara en Côte d’Ivoire. La conférence des chefs d’État de l’Union africaine est une organisation puissante qui fonctionne sur le principe de la solidarité entre les chefs d’État ».
Moussa Faki Mahamat, le président de la Commission de l’Ua, avait apporté un soutien de poids à la nouvelle Cei réformée, alors qu’elle ne satisfait pas une bonne partie de l’opposition. « Faisant suite à l’adoption par les deux Chambres du Parlement de la loi portant recomposition de la Commission électorale indépendante en Côte d’Ivoire et à sa promulgation, le président de la Commission de l’Union africaine se félicite de ce que l’arrêt rendu par la Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples ait été pris en compte tel qu'en atteste le préambule des motifs du projet de loi introduit au Parlement », avait expliqué Moussa Faki Mahamat, à travers un communiqué en date du lundi 19 août 2019. Puis il a salué « l’ensemble des acteurs politiques en Côte d’Ivoire, y compris les organisations de la société civile, pour leur attachement aux valeurs démocratiques prônées par l’Union africaine et les encourage dans leur volonté à aller à des élections paisibles dans l’intérêt du peuple ivoirien ».
« Le président de la Commission de l’Union africaine ne désavouera jamais un chef d’État. Il a été désigné par eux », fait encore remarquer l’ancien ministre ivoirien des Affaires étrangères.
L’originaire de Séguela, mais qui est né à Bouaké, est revenu sur son bilan à la tête de l’organe en charge des élections en Côte d’Ivoire, non sans s’attribuer de bons points.
Ce que l’opposition doit faire pour …
« En Afrique, rares sont les Commissions électorales qui sont crédibles et qui disent qu’un président de la République en fonction a perdu les élections. Nous, nous l’avons fait en Côte d’Ivoire en 2010. C’es (...)
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