Charles Blé Goudé : « Il faut accepter la réforme de la CEI »
« Je ne participerai jamais à une alliance pour combattre un individu »

  • Source: linfodrome.com
  • Date: mer. 10 juil. 2019
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Dans cette interview accordée à TV5, Charles Blé Goudé parle de sa situation d'acquitté pas complètement libre de ses mouvements et se prononce aussi sur l'actualité nationale.

Comment est-ce que vous vivez cette situation d'acquitté pas complètement libre de ses mouvements ?

Je suis en liberté sous conditions, ce qui est différent d'une liberté conditionnelle. Je suis acquitté comme vous venez de le dire. Comme tout être humain qui aimerait être parmi les siens, retrouver les siens, retrouver la liberté de ses mouvements. Parce qu'en réalité, ce sont les mouvements de mon corps que je retrouve, j'ai toujours gardé avec moi ma liberté de penser qui, pour moi, est l'essentiel. Je suis content d'être libre.

 

L'ancien président Gbagbo, votre co-accusé se trouve en Belgique. Vous, vous êtes toujours aux Pays-Bas. Tous les pays qui ont été sollicités ont refusé de vous accueuillir. Est-ce que vous avez enfin trouvé un pays d'accueil ?

Vous ne m'avez pas trouvé dans la rue. En tout cas, contrairement à ce qui circule comme information, je ne suis pas un Sdf et vous me voyez bien entouré. Vous me voyez bien recevoir les miens. Et tout cela, pour moi, ce n'est pas important. Le plus important, c'est l'avenir de ma nation. Le plus important, c'est que la Côte d'Ivoire retrouve sa paix. Je suis un individu et ma vie n'est pas plus importante que la vie des Ivoiriens. Des Ivoiriens sont morts. Beaucoup sont blessés moralement, physiquement. C'est cela le plus important pour moi. Je suis en vie. Je peux donc donner un qualificatif à ma vie, à tout moment. Et quand on est un leader, il y a certaines choses qu'on doit assumer. Ma personne n'est pas importante. Je vis, je pense que je peux évoluer à tout moment.

 

Parlant de la Côte d'Ivoire, vous venez de passer 5 années en détention. Vous avez eu le temps d'observer la situation politique de votre pays. Selon vous, est-ce que la Côte d'Ivoire a réussi à panser les plaies de la crise postélectorale de 2010-2011 ?

C'est vrai que j'ai été absent pendant 8 ans. Un an et demi en exil au Ghana, un an et demi en détention en isolement à la Dst en Côte d ‘Ivoire. Comme vous venez de le dire, 5 ans derrière les barreaux de la Cour pénale internationale. Mais j'essayais plus ou moins de m'informer. Les observateurs de la vie politique en Côte d'Ivoire s'accordent pour conclure, que la réconciliation n'est pas ce que tout le monde attendait après la crise postélectorale en Côte d'Ivoire. Pour moi, voyez-vous, les tensions sont encore vives. Il suffit d'une petite altercation entre deux individus et très vite, ça va glisser vers un conflit intercommunautaire. On l'a observé ces derniers temps à plusieurs reprises.

Il suffit seulement d'une petite élection et puis ce sont les violences et des morts. Voyez-vous, les législatives en Côte d'Ivoire sans le président Gbagbo et moi, il y a eu des violences et des morts entre alliés. Il y a eu des élections municipales, il y a eu des morts et des violences. Il ya eu les élections régionales, il y a eu des morts entre alliés. Il y a un mal. Extirper la violence de la vie politique en Côte d'Ivoire. Nous devons nous atteler à atteindre cet objectif-là. Oui, j'ai peur. J'ai peur pour mon pays parce qu'au lieu de la confrontation des idées, on assiste malheureusement, à tout moment, à la confrontation physique. La réconciliation est un échec. Il faut maintenant arrêter seulement de critiquer et puis agir pour changer les choses dans le bon sens.

 

Le président Ouattara a favorisé une série de mesures justement pour cette réconciliation nationale : le retour des exilés, la libération et l'amnistie de certains prisonniers. Est-ce que vous êtes satisfait de son action en la matière ? Sinon qu'est-ce qu'il manque à votre avis ?

Je ne suis pas de ceux qui sont dans un négativisme total. C'est-à-dire tout ce qui vient de l'adversaire doit être considéré comme mauvais. Il y a eu des mesures que je salue sur ce plateau. Des mesures qui ont permis que des camarades de lutte, des autorités qui ont dirigé ce pays-là, retrouvent leurs familles. Je salue ces mesures mais il y a mieux à faire. On ne fait jamais assez pour la paix, et la Côte d'Ivoire a besoin de paix. Au moment où je vous parle, il y a des militaires qui sont en prison. Ils sont en tenue militaire, c'est vrai, mais ils sont d'abord des pères de famille. Ce sont des citoyens qui ont agi en servant l'État. Les politiques sont libres et les militaires sont en prison.

Je souhaite que des mesures soient prises pour que ces militaires puissent retrouver leurs familles. C'est même tout à l'honneur du président Ouattara de le faire. Parce que cela pourrait baisser la tension. Mieux, les exilés, il y en a qui sont rentrés, il y en a qui sont encore en exil. Des arrestations continuent aujourd'hui en Côte d'Ivoire. Je souhaite qu'on puisse aller plus loin. Au-delà de ceux qui sont en prison, il y a la question de la Commission électorale indépendante qui, aujourd'hui, cristallise les débats. Il faut accepter la réforme de la Commission électorale indépendante, pour la rendre véritablement indépendante, pour qu'elle puisse départager ceux qui vont compétir pour la présidentielle et bien d'autres phases de l'élection.

 

Je voudrais qu'on poursuive un peu sur la réconciliation nationale. Vous appartenez à l'opposition proche du Fpi de Laurent Gbagbo. Comment convaincre ceux qui nous écoutent, que vous seriez dans l'opposition pour faire la réconciliation nationale, alors que vous êtes encore divisés dans votre propre famille politique ? Je rappelle qu'il y a deux Fpi actuellement.

Vous allez me permettre de vous dire que moi j'ai confiance au président Laurent Gbagbo. Même dans les questions désespérées, il a toujours su, au cours, en tout cas de ces 10 dernières années qu'il a passées au pouvoir, apporter les solutions idoines. Il faut seulement qu'on évite de vouloir lui imposer notre agenda. Chacun veut imposer son agenda au président Gbagbo. Il faut lui faire confiance. Moi je suis sûr qu'il y arrivera un jour.

 

En 2020, aura lieu l'élection présidentielle en Côte d'Ivoire. A votre avis, quel rôle l'ancien président Laurent Gbagbo devrait jouer ?

Le président Laurent Gbagbo a des partisans. Il a beaucoup de partisans. Ce n'est pas moi qui le dit. Même ses adversaires d'hier disent que sa présence en Côte d'Ivoire pourrait participer à décrisper la situation et, mieux, à rapprocher les Ivoiriens les uns des autres. Réconcilier, c'est concilier ce qui était séparé. C'est un fait, les Ivoiriens sont divisés. Il faut que toutes les filles et tous les fils de la Côte d'Ivoire reviennent sur la terre d'Eburnie, ensuite, ils joueront un rôle. Je ne suis pas le seul à le dire. Le président Gbagbo a un grand rôle à jouer dans la réconciliation.

 

Concrètement, quelle forme est-ce que cela pourrait prendre ?

Je pense que je vais me limiter là parce que j'ai bien dit, il faut lui faire confiance. Je ne peux pas lire dans sa tête. Le jour où vous en aurez l'occasion, vous pourrez lui demander, il vous répondra. Je sais seulement qu'il a mal que la Côte d'Ivoire se trouve dans cet état que le jour où il en aura l'occasion, il jouera un grand rôle pour que la paix revienne en Côte d'Ivoire. Je lui fais confiance.

 

Et vous même ? Comment est-ce que vous comptez vous engager au service de votre pays pour 2020 ? Comment est-ce que vous souhaitez vous engager dans cette bataille électorale ?

D'abord pour la réconciliation dont nous parlons. Je n'ai pas attendu 2019 pour inviter Guillaume Soro, le président des Forces nouvelles à Gagnoa, dans la ville natale de Laurent Gbagbo. Je n'ai pas attendu 2019 pour inviter le commandant Wattao à Mama, la ville natale du président Laurent Gbagbo. Je n'ai pas attendu 2019 pour inviter la jeunesse des Forces nouvelles dans mon village, à Guibéroua. Je n'ai pas attendu 2019 pour inviter Konaté Sidiki, porte-parole des Forces nouvelles, en son temps, dans le même stade à Yopougon avec Mme Simone Gbagbo Ehivet, Mamadou Coulibaly, pour parler de paix.

Je n'attendrai donc pas 2020 pour participer à la réconciliation dans mon pays. Parce que ce n'est pas une option de faire la réconciliation en Côte d'Ivoire, c'est un impératif. Parlant d'élection en 2020, il faut bien que je sois en Côte d'Ivoire pour y participer. Mais, ce que je veux dire, chaque débat a sa tribune et chaque débat a son moment. Il ne faut pas réduire la vie de la Côte d'Ivoire à des élections. Et moi, je n'ai pas en tête tout de suite de me précipiter dans des élections. Je prendrai tout mon temps, je l'ai toujours dit. La conclusion du président Laurent Gbagbo sera mon introduction. A-t-il conclu ? Je ne crois pas qu'il l'ait encore dit. Donc, permettez moi que je prenne mon temps pour me former, pour mettre en place l'offre politique. Parce qu'avant tout, c'est de cela qu'il s'agit.

 

Est-ce que vous vous sentez prêt à soutenir un candidat en 2020 ?

On n'en est pas encore là. On soutient un candidat pourquoi ? Par rapport à l'offre politique qu'il propose à nos concitoyens. Parce que le projet politique qu'il porte est conforme aux besoins des populations, et quelle société veut-il bâtir. Est-ce que la société qu'il veut bâtir et sur la base de laquelle il fait campagne correspond au type de société dont moi je rêve ? C'est-à-dire une société basée sur des lois, sur des valeurs, des institutions fortes, des lois qui s'appliquent à tout le monde de manière générale impersonnelle et non de manière sélective, comme ce à quoi on assiste dans notre pays. Il y a tellement de choses.

La Côte d'Ivoire a besoin d'un système de santé fiable, qui puisse permettre au plus faible de se soigner. Moi, je ne veux plus qu'un jeune Ivoirien risque sa vie dans la méditerranée. Est-ce que ceux qui veulent être candidats veulent-ils seulement le pouvoir ou que veulent-ils faire ? Quelle société veulent-ils bâtir ? Voilà autant de questions auxquelles moi j'ai besoin qu'on donne des réponses, avant que je dise que je suis de tel ou tel. Nous ne sommes pas dans un stade de football. Nous parlons de la vie de millions d'Ivoiriens, s'il vous plait.

  

Vous avez quitté la Côte d'Ivoire, il y a 8 ans, quels éléments vous laissent penser qu'aujourd'hui, vous conservez l'influence politique dans votre pays ?

Je n'ai jamais dit que je conserve une influence politique dans mon pays. Ceux qui observent ont le temps de me juger. Et ce n'est pas dans mes habitudes de parler de qui je suis parce que pour moi, voyez-vous, une poule qui se respecte ne pond pas en public. Je fais ce que j'ai à faire. Je m'intéresse aux problèmes des Ivoiriens. J'essaie de participer à ma manière, à la vie politique dans mon pays. Suis-je encore influé ? Puis-je impacter la vie des Ivoiriens et la vie politique ? Ce n'est pas à moi de le dire. Je vous laisse le temps d'apprécier.

 

Vous étiez très proche de Simone Gbagbo, l'épouse de l'ancien président Laurent Gbagbo, également haut cadre dirigeant du Fpi. Est-ce que vous parlez régulièrement depuis que vous êtes sorti de prison ?

Oui, bien sûr. C'est une dame pour qui j'ai beaucoup de respect pour son parcours politique, sa constance. J'ai beaucoup de respect pour elle. Elle a souffert pendant des années. Elle a été libérée, j'ai été heureux qu'elle soit libérée. Quand moi aussi j'ai été libéré, bien entendu, il fallait que je lui dise que j'ai été libéré. Elle aussi voulait s'enquérir de mes nouvelles. Je pense que tous deux, sommes contents d'être en liberté, même si moi je suis encore en semi-liberté.

 

Simone Gbagbo n'est pas seulement une ancienne première dame, c'est aussi une femme politique. Selon vous, quel rôle doit-elle et peut-elle jouer en Côte d'Ivoire et notamment dans ces prochaines échéances électorales ?

Simone Gbagbo fait déjà le tour de la Côte d'Ivoire pour parler de réconciliation. Partout où elle passe, elle prêche la réconciliation. Je salue cette ligne qu'elle a adoptée pour la Côte d'Ivoire. Parce que ceux qui sont à même d'influencer positivement la situation politique en Côte d'Ivoire, à rapprocher les positions extrêmes, permettent aux Ivoiriens de se parler de nouveau. Parce qu'on ne peut pas passer tout notre temps à parler de conflits. Je voulais la féliciter pour cela. Je suis fier de cela. Elle parle déjà de réconciliation et elle continue de le faire malgré ce qu'elle a vécu. J'encourage cette action. Maintenant, je pense que c'est une femme politique, comme vous venez de le dire, je ne peux pas lui imposer un agenda. Personne ne peut le faire d'ailleurs. Il faut lui demander. Elle vous dira quel rôle elle jouera.

 

Selon vous, quel devrait être son rôle, vous qui la connaissez bien ?

Je pense qu'on ne peut pas jouer à la devinette. Vous avez bien dit tout à l'heure que je suis en dehors de la Côte d'Ivoire, je ne l'ai pas vue. Je ne maîtrise même pas toute la réalité politique en Côte d'Iv (...)

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