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Procès des pro-Gbagbo, poursuites dans le camp Ouattara / Le chef de division Droits de l'Homme de l'ONUCI parle : « Ceux qui sont poursuivis sont d'un seul camp » - « Des magistrats ont peur » - Il préconise des mesures contre des officiers FRCI

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Le chef de la division Droits de l'Homme de l'Onuci est formel: «Toutes les victimes ne se reconnaissent pas dans les poursuites judiciaires»

L'ancien ministre burundais, Eugène Nindorera, actuellement chef de la division droits de l'Homme de l'Onuci (Opération des Nations Unies en Côte d'Ivoire), a animé la conférence inaugurale de la rentrée solennelle du Mouvement ivoirien des droits humains (Midh), le jeudi 16 avril 2015 à Inades-Formation à Cocody-Mermoz.

Dans les échanges avec la presse, il a fait des révélations sur les poursuites judiciaires contre les pro-Gbagbo et celles annoncées dans le camp Ouattara, afin, dira-t-il, «de faire justice à toutes les victimes».

 

Dans votre communication sur le thème ''Protection des droits de l’Homme et lutte contre l’impunité en période post-conflit: comment concilier les nécessités de poursuites judiciaires avec la réconciliation et la paix'', vous avez ressorti le terme de justice minimum. Que doit-on entendre par ce terme?

Si on prend le rapport de la Commission nationale d'enquête, on parle de 3000 morts. Là, il s'agit de la crise post-électorale. Mais, si on porte le regard avant cette crise, on verra qu'il y a bien plus que 3000 morts. Et si on penche pour une justice intégrale, cela voudrait dire qu'il va falloir mener des enquêtes pour prendre en compte chaque Ivoirien qui a subi un préjudice. Je veux parler des blessés, des disparus, de ceux qui ont perdu des biens, qui ont été torturés. On devrait faire la justice pour tous ces cas là. C'est énorme et on ne pourra pas le faire. Ce n'est pas possible. C'est pour cela que je dis qu'il faut un minimum de justice. Et quand je dis un minimum de justice, c'est aussi en tenant compte de la réalité de la justice ivoirienne. Moi, je ne veux pas rêver. Le budget alloué à la justice, en général, et à la cellule spéciale d'enquête et d'instruction, en particulier, n'est pas suffisant. Peut-être que le ministère de la Justice peut négocier pour avoir une majoration, mais à court terme, il n'aura pas une majoration de 50%. Les effectifs dont on a besoin pour faire des enquêtes sur tous ces dossiers, le ministère ne les a pas, et il ne va pas les avoir de si tôt. C'est pour cela je dis que, si on veut parler d'une justice qui éclaire sur tout le passif de la crise, à mon avis, ce n'est pas réaliste, et cela ne peut pas marcher. Il faut une justice minimale.

 

Ramenant ce concept de justice minimum au cas ivoirien, faut-il entendre justice d'une partie au détriment d'une autre?

Non. Ce qui doit être fait, c'est de déboucher sur au moins la perception d'une justice qui soit équitable. Aujourd'hui, la réalité, c'est que ceux qui sont poursuivis, ceux qui sont en prison, sont les gens d'un seul camp. Quelque part, il y a un vide, et c'est la perception d'un certain nombre de citoyens, et surtout d'un certain nombre de victimes. Il y a des victimes qui ne se reconnaissent pas dans ce que la justice ivoirienne fait, en termes de poursuites, puisque jusque-là, elles ne voient pas les personnes qui sont responsables de leur malheur en train d'être poursuivies. Le gouvernement a déclaré, depuis fort longtemps, qu'il y aura des poursuites dans tous les camps. Mais, les faits sont là, et aujourd'hui, il manque cette perception qui pourrait amener tous les citoyens à avoir confiance dans ce qui est en train d'être fait. C'est pour cela que, généralement, quand je parle de justice minimum, c'est d'essayer d'avancer pour que les citoyens aient le sentiment qu'on est en train de rendre justice à tout le monde, au fur et à mesure qu'on avance pour ne pas conforter cette idée que la justice est quelquefois biaisée et qu'elle est favorable à un groupe plutôt qu'à un autre. C'est extrêmement important. Et parfois, il est important de mettre la main sur des leaders importants. C'est valable ici comme ailleurs. C'est valable dans mon pays, le Burundi. Moi, j'ai été à la Maca (Maison d'arrêt et de correction d'Abidjan, Ndlr), et il y a des prisonniers qui m'ont dit: «pourquoi, moi, on va me poursuivre alors que je n'ai fait qu'exécuter des ordres. Ce que j'ai fait, c'est sur ordre. Et celui qui m'a donné cet ordre est ambassadeur quelque part. Oui, moi, on veut me juger, il faut que l'ambassadeur soit à mes côtés». C'est la réalité. Cela veut dire, que si on veut vraiment que la justice avance, il faut que des actes soient posés. Le discours, c'est bien, mais les citoyens ne reti (...)

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