Fièvre Ebola / Pr Muyembe Tanfum (expert congolais) révèle : « On ne doit pas cesser de manger la viande de brousse » - « Le virus détecté dans la forêt de Taï depuis 1994 » - « Voici les plus exposés à la maladie »


Pr Muyembe Tamfum a tenu des propos rassurants pour les amateurs de la viande de brousse.
  • Source: Soir Info
  • Date: sam. 05 avr. 2014
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Pr Muyembe Tanfum est le directeur général de l'Institut national de recherche bio médicale de la République démocratique du Congo (Rdc).
En marge de l'ouverture de l'agence de la compagnie aérienne Air Côte d'Ivoire de Kinshasa, il nous a fait part, le 3 avril 2014, de son expérience de lutte contre l'épidémie de la fièvre hémorragique. Interview…


Professeur, qu'est-ce que  la fièvre hémorragique ?

Pr Muyembe Tamfun : Par définition, la fièvre hémorragique est une maladie qui se caractérise par une fièvre d'apparition brutale avec des maux de tête, des courbatures, etc. Et le malade présente plus tard, des symptômes hémorragiques. Soit des saignements de nez, de la bouche, la présence de sang dans les selles. Souvent, les yeux deviennent rouges. Donc, il y a un saignement généralisé. Et la mort survient, en général dans les 14 jours. Nous parlons de fièvres hémorragiques virales qui sont dues à des virus. Et les virus les plus dangereux, sont les virus Ebola et Marpoor qui sont cousins.

 

D'où vient le terme Ebola attribué à ce virus ?

Pr M.T : Le nom Ebola vient d'une rivière qui se trouve au nord, dans la province Équateur, en République démocratique du Congo où le virus a été identifié pour la première fois en 1976. Cette maladie se transmet très facilement par contact direct avec la peau d'un malade, son sang, ses urines, sa salive. En Afrique, il y a des circonstances qui favorisent  la transmission de ce virus : c'est lors des funérailles, où les femmes surtout, se mettent à laver les cadavres. C'est un moment très délicat et les personnes s'infectent à ces occasions.


Quelle est l'origine de ce virus ?

Pr M.T . : Ce que nous avons constaté, par exemple au Gabon, ce sont des chasseurs qui vont en forêt et qui trouvent un chimpanzé, un gorille, une antilope morte, qu'ils se mettent à dépecer. Ils entrent donc en contact avec le sang de ces animaux et s'infectent. Ils tombent malades, reviennent au village et contaminent leurs familles et puis, ils se rendent à l'hôpital. Et souvent dans nos hôpitaux en Afrique, les conditions d'hygiène ne sont pas bonnes. Les médecins, les infirmiers, etc. travaillent mains nues et vont se contaminer eux aussi. Voici comment commence l'épidémie.


Après, on a encore détecté une autre souche, c'était la souche Côte d'Ivoire, dans la forêt de Taï 

Quel a été le bilan de cette maladie dans la région ?

Pr M.T . : Cela dépend de la souche en circulation. Je vous ai dit que la maladie est connue depuis 1976. La deuxième grosse épidémie, c'était en 1995. Et puis nous avons eu des épidémies successives. Surtout au Gabon. Notamment en 1995, 1996, 2000, 2001 et 2003. Et puis, au Congo-Brazaville, au Soudan du Sud, en Angola, en Ouganda etc. Nous avons maintenant isolé le virus. Et la souche la plus virulente, c'est celle du Zaïre qui cause des épidémies ici en Rdc, au Gabon  et au Congo. La souche du Soudan est moins virulente. Après, on a encore détecté une autre souche, c'était la souche Côte d'Ivoire, dans la forêt de Taï.

 

Expliquez-nous un peu le cas de la Côte d'Ivoire

Pr M. T : C'était une épidémie chez les chimpanzés. On a vu que les chimpanzés de la forêt de Taï ont commencé à mourir facilement. Et, il y avait un chercheur  suisse qui s'y est rendu, qui a fait des autopsies et il s'est infecté. On a cru que c'était le paludisme ou la grippe et il a été évacué à Bâle ( Suisse). Dans son sang, on a identifié, à l'Institut pasteur de Paris, la souche Côte d'Ivoire. C'était en 1994. Pour le moment, c'est la souche la moins virulente. Nous pensions que Ebola était circonscrit ici en Afrique centrale, dans le bassin du Nil et dans le bassin du Congo, mais non. En fait, ces virus circulent dans toute l'Afrique.


La souche Côte d'Ivoire n'est pas virulente

Serait-ce alors cette souche Côte d'Ivoire, qui fait actuellement des ravages en Guinée-Conakry ?

Pr M.T . : Non. Le virus qui sévit actuellement en Guinée, c'est  la souche Zaïre, la plus virulente. La souche Côte d'Ivoire n'est pas vraiment virulente. Jusqu'à maintenant, elle s'est limitée au chimpanzé. A l'homme, il y a eu un seul cas, celui du chercheur suisse. Mais, il n' y a pas eu la transmission à un autre homme.


Comment êtes-vous parvenu à circonscrire ce virus ?  

Pr M.T . : On me pose toujours cette question. C'est-à-dire qu'il faut comprendre comment le virus se transmet. Quand vous comprenez ce mécanisme, il faut chercher à couper la chaîne de transmission. De telle sorte que le virus ne puisse pas apparaître chez des sujets sains. Donc, la maladie se limite aux malades. Il faut que ça s'arrête là.


Qu'est ce que cela veut-il dire concrètement ?

Pr M.T . : Concrètement, il faut créer un service d'isolement et y mettre tous les malades qui seront détectés. Comme cela, ils n'entrent plus en contact avec leurs familles, afin d'éviter de les infecter. Deuxième chose, il faut former le personnel médical et donner l'équipement de protection. Les malades ne seront pas abandonnées, il faut que les médecins et les infirmiers leur apportent l'assistance. Mais pour cela, le personnel médical doit avoir l'équipement adéquat : les gants, les blouses de protection, des scaphandres etc. Cela leur permettra de toucher les malades, leur donner les soins, sans être infectés. Cela est très important.

 

Y a-t-il un autre procédé ?

Pr M.T : Oui. c'est de former des équipes de surveillance qui iront dans les villages, dans les familles voir s'il y a des cas qui ont été en contact avec les malades. Ces personnes là doivent être suivies pendant 21 jours. Vous prenez sa température matin et soir. Si vous remarquez que la fièvre apparaît, alors vous l'emmenez faire des analyses dans un laboratoire. Si le test est positif, alors on l'isole. Il faut que la population comprenne cela et adopte ces mesures de santé publique. Si elle ne s'implique pas, alors le contour devient difficile.


Mais la question des contraintes sociales liées à la stigmatisation des malades va se poser, n'est-ce pas ?

Pr M.T . : Effectivement, ces mesures vont créer des bouleversements socio-culturels. Et c'est cela la grande barrière. Ce n'est plus une question purement scientifique. Comment amener la communauté à s'impliquer ? Si la population n'accepte pas cela, l'épidémie va durer dans le temps et s'étendre dans l'espace. Les malades vont aller le plus loin possible, contaminer le plus de personnes possibles.  Et alors cela devient compliqué.

 

Comment procédez-vous sur le terrain ?

Pr M.T : Sur le terrain, nous avons plusieurs équipes. Une pour s'occuper des malades, une pour la surveillance épidémiologique, une autre encore qui est chargée de la mobilisation sociale, c'est-à-dire, travailler avec les leaders d'opinion, faire de la sensibilisation, des conférences, etc. Puis, il y a une équipe qui est chargée de la logistique. Il y a une équipe d'hygiène et d'assainissement. A ce niveau-ci, nous disons souvent, que c'est l'hôpital qui amplifie les maladies.

 

Comment cela ?

Pr M.T : L'hygiène et l'assainissement sont souvent défaillants dans les hôpitaux. Il faut y mettre de l'électricité (...)

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