Boycott des élections, remise en cause de la CEI par l'UA, retrait des Etats africains de la CPI....
Stéphane Kipré sans détours : « Depuis 2011, on étouffe et brime l'opposition en Côte d'Ivoire »


(Photo d'archives)
  • Source: L'Inter
  • Date: mer. 30 nov. 2016
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Dans cet entretien qu'il nous a accordé, via Internet, le président de l'Union des nouvelles générations (Ung), depuis son lieu d'exil, livre, sans faux-fuyants, ses positions sur toutes les questions de l'actualité.

Stéphane Kipré se prononce, notamment, sur le boycott des scrutins référendaires et législatifs 2016 ainsi que la remise en cause de la Commission électorale indépendante (Cei) par une décision de la Cour africaine des droits de l'Homme et des peuples, récemment.

 

Président Kipré, l'Ung, à l'instar du bloc dit ''Gbagbo ou rien'', a décidé de ne pas présenter de candidat aux élections législatives prochaines. Qu'est-ce qui motive ce choix ?

Je ne sais pas ce vous appelez ''Gbagbo ou rien''. Je sais qu'il y a des hommes, des femmes et des partis politiques pour qui la libération du président Laurent Gbagbo est un impératif catégorique pour le retour de la paix et de la réconciliation en Côte d'Ivoire, et d'autres qui ont décidé de l'enterrer politiquement en s'accoquinant avec le pouvoir actuel. Pour revenir à votre question, je voudrais rappeler à toutes fins utiles que c'est notre parti, l'Union des nouvelles générations (Ung), qui a été la première formation politique en Côte d'Ivoire, à l'occasion de sa convention extraordinaire à Divo, à avoir décidé du boycott du référendum initié par M. Alassane Ouattara et de l'élection législative. J'ai par la suite, moi-même appelé l'ensemble des partis politiques engagés dans le combat à nous emboîter le pas dans notre logique. Bien heureusement, concernant le référendum, l'opposition, dans son ensemble, nous a suivi, et c'est dommage que concernant l'élection législative, certains aient décidé d'y participer,car les raisons de ce boycott sont les mêmes depuis 2011, et elles sont notamment liées à la sincérité du scrutin et l'état actuel du pays au niveau socio-politique.

 

La politique de chaise vide est-elle la solution, si l'opposition veut aspirer à changer la donne un jour ?

Encore faudrait-il qu'il y ait une chaise. Dans tous les Etats démocratiques du monde, il y a le pouvoir qui gouverne et l'opposition qui fait des contre-propositions, avec des droits garantis par la Constitution. En Côte d'Ivoire, depuis 2011, on étouffe l'opposition et on la brime. On bafoue totalement les libertés individuelles et publiques. Notre combat consiste donc à tout faire pour qu'il y ait une chaise qui est incarnée pour nous par l'exercice d'une véritable  démocratie. Les gens oublient le plus souvent, soit par méprise ou par ignorance, que la dynamique démocratique se nourrit, certes, de l'animation de la vie politique par les acteurs politiques, mais aussi elle trouve tout son sens dans la crédibilité des instruments en charge de l'organisation des scrutins démocratiques, et surtout de la proclamation des résultats issus de ces scrutins. L'Ung refuse de participer à une élection juste pour le plaisir d'y participer.

 

N'est-ce pas que cette opposition fait le jeu du pouvoir, qui semble avoir tout intérêt qu'il n'y ait d'adversaire en face ?

Ceux qui font le jeu du pouvoir, ce sont ceux qui l'accompagnent pour légitimer la fraude. Nous autres, nous dénonçons et nous nous battons pour le retour de la démocratie. Alors comment faisons-nous le jeu du pouvoir? Le boycott est un acte démocratique, et un régime tel que celui qui règne à Abidjan actuellement doit être isolé et non accompagné dans sa forfaiture.  

 

Appréhendez-vous ce qu'auraient pesé des députés à l'Assemblée nationale si vous en aviez ?  

Ecoutez, tout le monde sait que nous sommes majoritaires en Côte d'Ivoire, donc nous aurions forcément obtenu des députés. Mais, il ne s'agit pas d'être candidat pour le plaisir de concourir, mais pour gagner. Comment cela peut-il être possible quand le parti au pouvoir, avec le découpage électoral, s'est déjà octroyé 70 sièges et qu'il bénéficie du soutien de la Commission électorale dite indépendante pour tripatouiller les chiffres ? Il faut simplement admettre que M. Ouattara a décidé de nommer une partie des parlementaires comme au temps du parti unique afin d'attendre d'eux une soumission sans précèdent. Regardez d'ailleurs le sort qui a été réservé aux députés qui ont émis des réserves sur son projet de Constitution. Ils n'ont pas été reconduits, parce que dans l'esprit de M. Ouattara, l'Assemblée nationale n'est pas un contre pouvoir, mais une caisse de résonance.

 

Vous aviez appelé au boycott du référendum qui a adopté la nouvelle Constitution promulguée récemment par le chef de l'Etat. Quelle analyse avez-vous faite des résultats proclamés à l'issue de ce vote ?

Nous sommes globalement satisfaits de l'appel au boycott, puisqu'il a été largement suivi, contraignant M. Youssouf Bakayoko à se livrer à son sport favori qui est de manipuler les chiffres pour les rendre non conformes à la réalité des urnes. L'opinion nationale et internationale sait pourtant que le taux de participation ne dépasse pas 10%. Mais en plus, il faut dire que le nombre de personnes ayant approuvé la Constitution de 2000, dite conflictuelle par nos contradicteurs, est supérieur à ceux qui ont donné leur accord à celle de M. Ouattara en dépit du fait que le nombre d'inscrits sur la liste électorale ait largement augmenté. C'est un désaveu total dont le pouvoir en place aurait dû tenir compte pour tirer les conséquences.

 

L'opposition remet en cause le taux de participation de 42,42% publié par la Commission électorale indépendante. A qui la faute, si cette opposition était absente dans les urnes ?

Nous ne sommes pas les seuls à douter de ces chiffres. Tous les observateurs nationaux et  internationaux qui ont couvert le scrutin sont sceptiques sur le taux rendu public par la Cei. En boycottant cette mascarade, si besoin l'était, nous avons démontré à tous que ce pouvoir est minoritaire. Si au contraire, nous avions appelé nos militants à se rendre massivement aux urnes pour dire ''Non'' à cette Constitution, nous aurions commis une grave erreur politique, car, d'une part, cette large participation aurait légitimé un taux falsifié plus largement et encore plus gravement, et, d'autre part, notre ''Non'' aurait été comme d'habitude transformé en un ''Oui'' plus massif.

 

Comment peut-on se fier aux différents taux affichés par l'opposition (5%, 7%, 9 ou 11% , selon les différentes tendances) alors qu'elle n'était pas présente dans les urnes ?

Nous avions des points relais et les chiffres que nous avançons sont le résultat d'un travail efficace sur le terrain. Cependant, au-delà de la guerre des chiffres dans laquelle je ne souhaite pas m'éterniser, il faut admettre que le taux de participation était très faible et en deçà de celui de 2000 pour une Constitution que l'on a présentée comme devant réconcilier les Ivoiriens.

Au fond, n'est-ce pas une politique suicidaire pour l'opposition ivoirienne que de s'abonner absent aux différentes élections, au détriment de ses militants ?

Concernant l'Ung, ce sont les militants eux-mêmes qui ont décidé du boycott, lors de notre convention. Et vous voyez que le peuple nous a suivi. Ce qui aurait été suicidaire, c'est d'aller contre la volonté du peuple. En plus, ce qui parait suicidaire est plutôt de participer à un scrutin juste pour le plaisir d'y participer, sans avoir en main les moyens de veiller à la sincérité, à l'impartialité du scrutin et de la crédibilité de l'institution en charge d'en proclamer (...)

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