Dans une interview accordée à l'AIP, la présidente du Programme national de cohésion sociale, Pr Koné Mariatou, fait le bilan de ses activités et promet le début de l'indemnisation des victimes par ceux ayant perdu des parents.
La question sous-jacente, c’est combien de personnes ont été recensées ? Je dois vous avouer qu’à ce jour, il est difficile de produire un chiffre fiable. Dans la mesure où le recensement s’est opéré sur l’ensemble du territoire national, Il faut que les derniers chiffres remontent. Et puis, les associations de victimes ont procédé à des recensements.Â
Le Programme national de cohésion sociale a reçu des victimes. Donc, nous avons recensé des victimes. La CONARIV dans ses démembrements au niveau national, a aussi recensé des victimes. Sans compter qu’il y a des organisations de la société civile qui détiennent des listes de victimes, ainsi que la CDVR qui, en son temps, avait recensé des victimes.
Il y a donc plusieurs listes de victimes qui sont à consolider. C’est-à -dire que nous devons mettre toutes ces listes ensemble, tous ceux qui détiennent une liste, y compris les agents du Système des Nations Unies. Nous devons centraliser toutes ces listes, pour que nous puissions dire qu’aujourd’hui, nous avons tel nombre de victimes.
En 1995, il y a eu le boycott actif avec des morts et des préjudices. En 1999, la Côte d’Ivoire a connu son premier coup d’Etat. On a vu également ce que cela a coûté à notre pays en termes de vie humaine, de perte en biens matériels, etc.Â
En 2000, à la faveur des élections, on a également vu ce qui s’est passé. En 2002 également. Donc les personnes à prendre en compte, c’est depuis les victimes de 1990. Et pour décrire les crises en Côte d’Ivoire, nous, nous remontons en 1990.
Parce qu’il y a des personnes qui se sont fait recenser à plusieurs endroits. Donc il faut pouvoir retirer les gens qui se sont fait enrôler plusieurs fois. Après, il faudra que chacun apporte la preuve. Parce que jusque-là , c’est des présumées victimes.Â
Chacun se déclare victime, vient avec ce qu’il pense, pour justifier sa qualité de victime. Mais il y aura un texte de loi qui va nous indiquer qui est la victime qui doit être prise en compte par le fonds spécial. Tout le monde est victime, mais qui sont les victimes qui doivent être prises en compte par le fonds spécial ?
Pour d’autres, c’est une prise en charge médicale. Parce que vous savez, les crises sont survenues depuis longtemps, mais il y a des gens qui ont été amputés, qui ont encore des séquelles. Il y en a qui ont des balles dans le corps, des traumatismes, des troubles psychologiques, etc. Donc, pour certains, ça doit être une prise en charge médicale, pour d’autres, une prise en charge psychologique.
Pour d’autres encore, il sera question de leur remettre une somme forfaitaire, parce que, quelqu’un qui a perdu son parent, est-ce qu’on peut payer la vie de quelqu’un ? Donc, même si on lui donne des milliards, on ne peut pas réveiller la personne qui est décédée.Â
Donc c’est vraiment quelque chose de symbolique qu’on va remettre à celui qui a perdu un être cher. Et c’est surtout par cette catégorie-là que nous allons commencer l’opération d’indemnisation.
Mais, les conflits se sont atténués. Nous parcourons l’ensemble du territoire. Les conflits fonciers, faisant allusion aux agriculteurs-éleveurs, entre agriculteurs et les populations, à propos de la gestion des terres, de lots, etc. Les conflits, de mon point de vue, se sont atténués.Â
Il y a des jours où on ne pouvait pas circuler. Aujourd’hui, on peut circuler sur l’ensemble du territoire national. Il y avait des catégorisations qui se faisaient, en tout cas de façon ouverte, qui ne se font plus.Â
Avant, il y avait les pros-Gbagbo, les pros-Ouattara. Celui-là c’est un dioula, etc. Même si cela se fait, ce n’est plus au grand jour comme par le passé. Cette stigmatisation se fait peut-être sous cape, mais pas de façon visible comme cela se faisait à un moment donné. Pour moi, ce sont des résultats que nous pouvons inscrire à nos actifs.
Aujourd’hui, il y a des gens qui sont à la frontière du Libéria et autres, prêts à rentrer, mais le virus Ebola avait freiné leur arrivée. Ils frappent à la porte, et bientôt ceux-là vont rentrer. Nous travaillons avec le SAARA, le service qui est au ministère des affaires étrangères. Régulièrement, les réfugiés rentraient au pays. Mais à cause de cette crise d’Ebola, certains sont encore là -bas.
Il a passé un message, nous étions en mission avec l’ADDR, et les gens sont venus déposer des armes. Tout cela, ce sont des actes qui sont positifs, qui montrent que chacun a compris la leçon, en matière de paix et de cohésion sociale. Donc, le bilan, nous pouvons le multiplier comme ça.
C’est une carte que nous actualisons au fur et à mesure. Voilà , c’est tout ce que je peux dire. Quand nous sentons qu’il y a la tension qui couve quelque part, tout de suite, nous essayons, à travers la chefferie traditionnelle, le corps préfectoral, d’éteindre ce feu.
Parce que si aujourd’hui ils sont forts, ils se reconnaissent comme leaders de partis politiques, maires, députés, sous une bannière politique, c’est parce qu’ils ont des militants et que le pays est en paix.Â
Mais qu’est-ce qu’un leader politique sans militants ? La politique qu’ils sont en train de faire, c’est pour les Ivoiriens. Mais faire la politique pour les Ivoiriens, il faut que ceux-ci soient en paix. Si les Ivoiriens ne sont pas en paix, ils ne peuvent pas faire leur politique.Â
Qu’ils pensent à eux-mêmes, à la Côte d’Ivoire. Parce que le travail qu’ils font, c’est un travail pour la Côte d’Ivoire. Mais quand j’aime mon pays ou mon village, je ne le montre pas avec la main gauche. Qu’ils soient des artisans de paix, se mettent ensemble pour la construire.
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Nous nous adressons aux leaders politiques, au corps préfectoral, jeunes, à la chefferie, pour que chacun s’inscrive dans le train de la paix. A la faveur de cette activité que nous menons, sur les élections apaisées, nous avons, sur la proposition des leaders eux-mêmes, proposé qu’il y ait une charte de bonne conduite, signée par tous les leaders de partis politiques, qui participent à tous à nos réunions, à la plate-forme que nous avons créée.Â
Mais, ce que nous avons dit, et sur lequel nous avons insisté, c’est qu’il ne s’agit pas d’un code de bonne conduite pour dire qu’il y en a un, comme cela a été le cas par le passé. Il faut que chacun respecte son engagement, sa signature.Â
Être citoyen, c’est également cela. C’est celui qui pense à son pays. J’ai apposé ma signature, et je dois respecter ma parole. Respecter sa parole, c’est ce qui doit accompagner le code de bonne conduite, qui est en cours d’élaboration. Et vous serez appelés, je pense, pour la signature.Â
L’exposition mettait en valeur 40 femmes ayant obtenu, entre 1952 et 2015, au moins un des diplômes délivrés par l’Ecole, et votre portrait en faisait partie. Toutefois, vous avez très peu réagi après cette distinction. Pouvez-vous aujourd’hui nous dire vos impressions à ce sujet ?
Donc c’est un sentiment de fierté. Je crois que l’Etat en a mesuré la portée, c’est pour cela qu’en conseil des ministres, une délégation a été désignée pour m’accompagner pour recevoir ce prix. D’ailleurs, sur la note qui a été faite sur la photographie là -bas, cela va rentrer dans l’histoire. Ils ont mis en quête de l’excellence. Il faut toujours bien faire ce qu’on vous demande de faire.Â
C’est ce que je retiens. C’est ce que le président Houphouët disait : "chaque ivoirien peut servir et doit servir son pays, à quelque niveau que ce soit, pourvu qu’il y mette du sien, qu’il s’y investisse". C’est ce que j’ai essayé de faire, que j’essaie de faire au quotidien, y compris au Programme national de cohésion sociale. Faire en sorte qu’on obtienne des résultats.
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