3ème Pont d'Abidjan / Alors que les travaux sont encore en cours : Le maire fait des révélations - Des populations en colère


Caisson au Départ du Quai
  • Source: Soir Info
  • Date: mar. 03 déc. 2013
  • Visites: 20665
  • Commentaires: 61
A Marcory, l'image est frappante. A mesure que l'autoroute du pont Henri Konan Bédié (HKB) qui traverse la commune prend forme, des familles entières, notamment des opérateurs économiques, voient leur avenir s'effondrer. Laissant poindre à l'horizon, le spectre d'un arrêt de mort qui fait déjà des victimes. Reportage.

Grogne. Récriminations. Accusations tous azimuts, le tout porté par une angoisse à peine voilée… Tous ceux qui s'extasiaient devant l'avancée progressive des travaux de l'autoroute du 3ème pont qui traverse Marcory, et qui s'étonnent d'entendre, aujourd'hui, ''l'hostilité' de certains riverains qui voient en cette infrastructure, plus la signature d'un arrêt de mort que la route vers un avenir radieux, en seraient moins surpris s'ils avaient entre les mains le scanner complet des ''œufs'' qu'on est censés casser pour réaliser cette impressionnante omelette autoroutière. Il est question d'un certain ''reprofilage'' de la cartographie même de la commune. Chose qui, bien entendu, ne saurait se faire sans quelques ''dommages'' collatéraux.

Déjà, depuis que les travaux sont entrés dans leur phase active, ce sont plusieurs dizaines de familles, des opérateurs économiques, dont les commerces sont plus ou moins impactés par la situation, qui ont le sommeil trouble. « C'est évident, cette autoroute est enmille maquis marcory train de nous tuer. Certains même sont déjà ''morts'', puisqu'ils ont dû fermer boutique. On s'est entendu dire que les autorités allaient examiner notre cas. Mais en réalité, c'étaient des promesses de campagne. Aujourd'hui, pour nous qui sommes encore là, chaque jour, c'est avec la peur au ventre qu'on arrive au travail », explique Kady. S, indexant directement Aby Raoul, le nouveau maire de Marcory. Et la jeune femme, propriétaire d'un restaurant derrière le grand marché, d'insister : « Voyez-vous-même et interrogez les commerçants du secteur. Vous comprendrez. C'est effrayant ce qui se passe déjà, avec cette autoroute ! Quel est donc ce développement qu'on réalise au détriment des populations ? », s'insurge-t-elle.

Comme s'ils s'étaient passé le mot, la quasi-totalité des opérateurs économiques et autres commerçants interrogés, ne sont guère tendres à l'endroit des autorités municipales de Marcory. Pour eux, tous leurs malheurs actuels (baisse des ventes, menaces pendantes de déguerpissement, inaccessibilité aux clients, tracasseries avec les agents municipaux, taxes perçues malgré la sinistrose évidente…), et même futurs (déguerpissement, faillite, chômage…), ont un seul et unique responsable : le maire Aby Raoul et son conseil qui, jusqu'ici, dit-on, n'ont manifesté aucune compassion pour les commerçants ''victimes'' de l'autoroute. « C'est avec ce qu'on fait ici, qu'on s'occupe de nos familles, qu'on paie l'école de nos enfants. On ne demande que quelques mesures d'accompagnements pour nous permettre de sauver nos commerces. Sinon, c'est la mort pour des centaines de familles », implore Angèle R. dont le maquis situé dans le voisinage des ''Mille maquis'' derrière le marché, a vu sa clientèle fondre comme du beurre au soleil depuis que les travaux de l'autoroute y ont ''compliqué'' l'accès. « Pourtant, si quelqu'un est bien informé de ce que des commerces sont en train de fermer et que des familles entières risquent ''d'exploser'', c'est bien le maire », croit savoir B. Oka, manager d'un bar aux Mille maquis. Ainsi, entre deux récriminations – toujours à l'endroit des autorités municipales –, Eugénie. H, propriétaire d'un magasin de vêtements et d'accessoires-beauté, assène, sur un ton révolté : « Le pire dans tout ça, c'est que, jusqu'ici, personne ne s'émeut ! »L'émotion. En tout cas, c'est ce qui manque le moins chez ces ''victimes de l'autoroute''.

Propriétaires, managers, gérants de maquis ou bars, restauratrices, braiseuses de poulets et de poissons, serveuses, vigiles-portiers, vendeuses d'eau, vendeurs de cigarettes et préservatifs, ''rabatteuses'' chargées d'attirer les clients aux braiseuses et même travailleuses du sexe… Des ''Mille maquis'' à la pharmacie Tiacoh, en passant par l'axe Injs-ancien carrefour d'Anoumabo où des night clubs se sont retrouvés enclavés et coupés du gros de leurs clients, c'est plus d'une centaine de familles qui voient ainsi, leur vie s'effondrer à mesure que se dessine l'autoroute.

Ici, le vrombissement quotidien des machines au travail résonne plutôt comme un requiem pour ces travailleurs. Les riverains interrogés n'ont pas non plus l'angélus à la bouche : le nouveau visage qu'affiche Marcory, depuis le lancement des travaux de l'autoroute, est en déphasage total avec le slogan de ''commune chic'', que le maire annonçait lors de la campagne municipale, grogne-ton.

Selon dame Ruth D., Infirmière d'État vivant au quartier Résidentiel, « il suffit de faire un tour dans un rayon délimité de 200 à 500 mètres de l'autoroute, pour comprendre » l'autre drame de la commune : l'insalubrité.

Des boulevards-poubelles

A Marcory, c'était le carrefour le plus névralgique. Avec le grand marché, l'entrée principale d'Anoumabo, les Mille maquis, le Centre commercial à quelques encablures… et la célèbre pharmacie Amitié, repère incontournable pour des rendez-vous de toute sorte. Aujourd'hui, ce carrefour dit aussi ''feu du marché'' est devenu un véritable calvaire. Une sorte de goulot d'étranglement pour tous les usagers (automobilistes, motocyclistes, piétons…) qui empruntent le boulevard du Cameroun ou ''Ligne 11''. Ici, le ''tunnel'' créé par les parpaings installés pour isoler le chantier de l'autoroute et réguler les travaux, impose d'emblée, un ralentissement aux véhicules. Provoquant du coup, de gros bouchons qui ''piègent'' les automobilistes qui mettent parfois plus d'une demi-heure pour en sortir. Et, l'épreuve est d'autant plus pénible, que l'air, à cet endroit, est lourd, irrespirable.

En cause, la longue ''ligne'' de poubelles à ciel ouvert, constituée depuis l'entrée de la pharmacie Amitié, jusqu'en pleine chaussée, dans l'emprise même du ''tunnel'', et qui dégage une puanteur de hyène en décomposition. « En fait, la décharge de pré-collecte à l'entrée d'Anoumabo étant fermée du fait des travaux de l'autoroute, on n'a pas d'autre choix. Et puis, c'est pour faciliter la tâche aux camions de ramassage, qu'on déverse les ordures ici », expliquent de jeunes travailleuses du marché et des Mille maquis, portant des seaux de poubelles à une heure bien tardive de la nuit. Mais, gros problème : la régularité ne semble pas figurer dans le cahier de charges des camions commis au ramassage. Constat : non seulement ces camions ne pointent que de temps à autres, tantôt de jour, tantôt de nuit, à des heures très avancées, « mais dans tous les cas, en général, ils n'emportent que la moitié ou les trois-quarts des immondices », soutiennent nos interlocuteurs. Conséquence : que ce soit sur le boulevard du Gabon, dans le voisinage de ''La Madone'' ou le boulevard du Cameroun au feu du marché, ou encore derrière le marché, pour ne citer que ces sites entre autres, les poubelles géantes ceinturent inexorablement la commune et y prospèrent même. Constituant de véritables menaces, tant pour la santé des riverains que pour la sécurité des automobilistes avec les voies rendues souvent exigües par ces montagnes de poubelles.

« Cela fait six mois que le nouveau maire est là. Mais en lieu et place de la ''commune chic'' qu'il nous avait promise, ce sont des poubelles qu'on voit partout pour le moment », grogne Francis B., enseignant résidant dans le voisinage de l'ex-La Madone. Dame Gogoua D., fonctionnaire d'État résidant au Groupement foncier n'est pas moins ''mordante'' : « Aujourd'hui, dans toute la commune, des voies sont barrées du fait des travaux du pont. Mais, que ce soit pour se rendre à Anoumabo ou autre, aucune pancarte n'indique les détours. (…) Et les ruelles de nos quartiers sont transformées en route par les conducteurs qui veulent éviter les bouchons. Sans oublier la menace sur la vie de nos enfants qui y jouent », renchérit-elle.

Aux Mille maquis où nous bouclons notre visite ''technique'' de la commune quelques jours après (le samedi 16 novembre 2013), c'est le choc. Cet espace fort célèbre pour son ambiance chaud-bouillante distillée sept jours par semaine par la longue chaine de bars, clubs privés et autres maquis, n'est plus que l'ombre de lui-même. Fantomatique. On y sent presque le souffle des mille et un espoirs qui se sont brisés là, du jour au lendemain, sous la pression de l'autoroute en construction. Même si quelques commerçants s'efforcent encore de maintenir allumée la flamme en ouvrant leur établissement les soirs, il y flotte un parfum insoutenable de deuil.mille maquis marcory Et même d'insécurité, avec le bataillon d'enfants de la rue qui ont trouvé sous des hangars abandonnés par des braiseuses de poulets, des dortoirs de rêve. « Voici le cauchemar que les lampadaires de l'autoroute ne montreront peut-être jamais. Voici l'envers du décor que la télé ne montrera jamais le jour de l'inauguration du troisième pont. Voici comment une autoroute qui n'est même pas encore achevée, tue des familles entières », laisse fuser, presque philosophe, Moïse D, jeune vendeur de cigarettes et préservatifs aux Mille maquis.

L'autoroute des grands changements

A son cabinet à la Mairie de Marcory sise en zone 3, c'est un Aby Raoul plutôt relaxe et d'humeur égal qui nous reçoit dans son bureau ce mercredi soir – 13 novembre 2013 –, aux environs de 20h. « J'ai été informé de votre reportage et des griefs des populations. C'est leur droit de se plaindre », lance-t-il tout de go. Avant d'assener sur un ton rassurant : « Nous comprenons les inquiétudes des uns et l'impatience des autres. Mais, nous avons été élus sur un programme que nous avons po (...)

Lire la suite sur Soir Info


client économiques lancement secteur don ordures riz État jeunes Henri Konan Bédié HKB Marcory Cameroun chômage 3ème pont fonctionnaire déguerpissement développement santé



Educarriere sur Facebook