CPI / Fatou Bensouda insiste : ''Le cas Gbagbo est le premier dossier ivoirien et ne sera pas le dernier...''

  • Source: L'Inter
  • Date: jeu. 18 juil. 2013
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Un an après sa prise de fonction en juin 2012, la procureure de la Cour Pénale Internationale, Fatou Bensouda, donne sa vision de l'institution créée en 2002. Entretien.

Le procureur de la Cour pénale internationale (CPI) depuis juin 2012, Fatou Bensouda, vêtue d'un ample boubou bleu à motifs, reçoit dans son bureau perché au 9e étage du siège de l'institution, à La Haye, aux Pays-Bas.

La vocation de cette juriste gambienne, en partie formée au Nigeria, remonte à l'enfance. Témoin du calvaire d'une tante martyrisée par son époux, la petite Fatou n'a jamais admis d'être éconduite lorsqu'elle accompagnait la victime pour porter plainte au commissariat de police. Promue procureur général de Banjul dès 1987, elle hérite 11 ans plus tard du maroquin de ministre de la Justice.

Mais la cohabitation avec le président Yahya Jammeh, tyran aux lubies proverbiales, sera de courte durée. Son parcours conduit ensuite cette ancienne experte en droit maritime à Arusha (Tanzanie), siège du Tribunal international pour le Rwanda, puis dans la cité portuaire batave, où elle sera des années durant l'adjointe du premier procureur, l'Argentin Luis Moreno Ocampo.

Quel jugement portez-vous sur la performance de la Cour pénale internationale (CPI), à l'aune des espoirs suscités par sa création ?

En dépit de ce que disent ses détracteurs, je considère que la CPI fonctionne extrêmement bien, au regard des conditions difficiles dans lesquelles elle opère et des contraintes qu'elle subit. Il y a eu tant à faire en dix ans... Nous avons établi cette Cour en 2002 à partir de rien. Puis il a fallu recruter un personnel de qualité, ce qui prend du temps, mettre en place nos stratégies et nos modes de fonctionnement. Dans le même temps, nous avons dû commencer nos investigations sur la République démocratique du Congo (RDC), à la demande de celle-ci, alors même que nous parvenaient d'autres requêtes émanant de la République centrafricaine (RCA) comme de l'Ouganda. Même si nous avons tiré profit de l'expérience des tribunaux ad hoc [Rwanda et ex-Yougoslavie], le cas de la CPI reste singulier. Pour la première fois, il était question de participation des victimes et de réparations. Enfin, il a fallu agir alors dans des pays où la guerre faisait encore rage, en veillant sur la sécurité des victimes, des témoins et de nos équipes.

Un seul verdict en 11 ans d'existence. A qui la faute ?

Il ne s'agit pas de blâmer quiconque. Cette Cour repose sur un dispositif complexe avec ses différents organes, qui doivent oeuvrer ensemble. Même si le Bureau du Procureur est le moteur des enquêtes, nous devons nous assurer que celles-ci sont conduites de manière appropriée dès la phase préliminaire, veiller à la qualité des preuves soumises aux juges qui auront à les évaluer. Le Greffe, pendant ce temps, assure le soutien administratif. Et n'oublions pas la défense, qui fait bien sûr partie du système, tout comme les représentants des victimes.

Le 3 juin dernier, la Chambre préliminaire a décidé d'ajourner l'audience de confirmation des charges pesant sur Laurent Gbagbo. Victoire totale pour la défense, proclament les avocats de l'ex-président ivoirien. Comment expliquer un tel revers ?

Nous ne sommes pas d'accord avec cette décision, et nous avons d'ailleurs fait appel. En l'espèce, il s'agit de déterminer s'il y a lieu d'aller au procès ou pas. Un des juges a considéré que l'accusation a atteint le seuil de preuves requis, les deux autres non. Il ne s'agit ni d'un acquittement, ni d'un rejet complet du dossier, mais d'une demande de preuves supplémentaires.

On reproche notamment à votre Bureau d'avoir fourni pour l'essentiel des documents et témoignages de seconde main.

Je le conteste. Que ceci soit clair: nos accusation ne reposent pas sur le travail des médias ou sur des textes de blogs. Nous devons conduire des investigations indépendantes et soumettre les preuves aux juges. C'est ce que nous avons fait. Et j'ai confiance dans le fait que les éléments complémentaires que nous verserons aboutiront à confirmer les charges contre Laurent Gbagbo.

Le procès du rebelle congolais Thomas Lubanga, condamné à 14 ans de prison, a pâti lui aussi de la fragilité des témoignages.

J'ai dit et je répète que le moment est venu de tirer les leçons du passé. J'ai annoncé publiquement que, sous ma direction, nous réviserons notre stratégie. Nous y travaillons en interne, mais aussi avec le concours d'experts extérieurs. Je ne prétends pas que ce Bureau est parfait. Le dossier Lubanga, le premier le premier à avoir suivi l'intégralité du cycle judiciaire, nous offre l'occasion d'examiner calmement notre travail, de l'évaluer et de vérifier que nous avançons bien dans le bonne direction.

Manquez-vous d'enquêteurs aguerris et de juges compétents ?

Je ne dirai évidemme (...)

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