Débats sur un 3ème mandat pour Ouattara : Cissé Bacongo, Conseiller spécial du président de la République, rompt le silence


Aucun président de la République ne peut encore se maintenir au pouvoir, «ad vitam aeternam», contre la volonté des citoyens
  • Source: linfodrome.com
  • Date: vend. 08 juin 2018
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Le ministre Cissé Ibrahim Bacongo, le Conseiller spécial du président de la République chargé des Affaires juridiques, institutionnelles et politiques, Cissé Ibrahim Bacongoqu'on dit être l'auteur du premier draft de la nouvelle Constitution ivoirienne, a rompu le silence sur la question du probable 3ème mandat du président de la République, Alassane Ouattara. Ci-dessous, sa contribution au débat qui a cours.

Le meilleur profil au Rhdp, pour l'élection présidentielle de 2020, sera «la personne qui réussira à faire le consensus, qui aura le plus de compétences et d'expérience. Le président Henri Konan Bédié et moi-même aurons notre mot à dire, mais ce sera un processus démocratique (…). La nouvelle Constitution m'autorise à faire deux mandats à partir de 2020. Je ne prendrai ma décision définitive qu'à ce moment-là, en fonction de la situation de la Côte d'Ivoire. La stabilité et la paix passent avant tout, y compris avant mes principes». Quant au président Bédié, «ce serait sa décision.» Trois réponses données par le président de la République à trois questions posées lors de l'interview retranscrite sur cinq pages, qu'il a accordée à l'hebdomadaire Jeune Afrique, dans sa livraison du 3 au 9 juin 2018. Il n'en fallait pas plus, pour que la Toile s'embrasse, la presse écrite avec.

Actuellement, cette dernière tourne à plein régime, grâce au combustible des déclarations indignées et des prises de positions véhémentes d'une opposition jusque-là hagarde, qui avait le vague à l'âme. Et pourtant, les réponses données par le président de la République auraient dû être analysées ou perçues comme une clarification visant à mettre fin aux confidences improbables, aux messes basses et aux rumeurs suffocantes sur sa volonté de se présenter ou non à l'élection présidentielle de 2020. Mais, tout porte à croire que c'est, en réalité, l'éventualité que cette volonté puisse s'exprimer, qui est réprimée, par prévention. Sinon, le débat en cours n'aurait aucun sens, pour diverses raisons.

 

Formulation.   D'abord, la formulation des réponses du président de la République. Elle aurait dû suffire à faire l'économie de la mêlée ridicule qui a lieu actuellement. En effet, la première réponse dépeint le portrait du candidat du Rhdp en 2020 comme étant «la personne qui réussira à faire le consensus, qui aura le plus de compétences et d'expérience». Et le président de préciser que «(…) le président Henri Konan Bédié et moi-même aurons notre mot à dire, mais ce sera un processus démocratique (…)». Cette réponse se passe de commentaire, parce que le président de la République et le président Bédié ne peuvent pas avoir leur mot à dire dans le processus démocratique du choix du candidat du Rhdp, s'ils sont eux-mêmes candidats. Quant à la deuxième réponse, elle traduit une compréhension, sinon une interprétation de la nouvelle Constitution, qui peut être défendue, valablement.

Pour cause, cette Constitution crée un nouvel état de droit. Dès lors, on peut soutenir qu'elle ne s'applique pas au second mandat du président de la République. Ce mandat était déjà en cours, depuis un peu plus d'un an, avant son entrée «(…) en vigueur à compter du jour de sa promulgation (…)». Le fait que les nouvelles dispositions visées soient identiques aux anciennes ne constitue pas un argument définitif, pour deux raisons d'égale valeur. D'une part, les dispositions pertinentes de l'ancienne Constitution ne peuvent pas s'appliquer comme une simple survivance de celle-ci, pas plus que les dispositions de la nouvelle ne peuvent être rétroactives et s'appliquer par anticipation, même si les unes et les autres sont identiques.

D'autre part, si la nouvelle Constitution avait supprimé la limitation de la durée du mandat présidentiel, l'ancienne n'aurait pas pu empêcher le président de la République de se représenter devant le Peuple, pour de nouveaux mandats. A cet égard, il existe un précédent au Sénégal, dont la démocratie est prise en exemple en Afrique. Dans un débat similaire à celui qui a cours ici actuellement, le Juge Suprême sénégalais s'était prononcé en faveur de l'éligibilité du Président Abdoulaye Wade, dont le second et dernier mandat courait encore à la date d'entrée en vigueur des nouvelles dispositions de la Constitution. Cette décision pourrait servir de raison écrite, pour utiliser une formule consacrée en droit ivoirien. Sauf que qu'en Côte d'Ivoire, le président de la République n'a pas encore décidé, pour le moment, de se présenter à l'élection présidentielle de 2020, comme il le précise, lui-même.

Par ailleurs, il est vrai que l'auteur du présent papier avait affirmé, dans une interview accordée à une Web-Tv, lors de la campagne référendaire, en même temps que d'autres membres du Comité des experts, que l'article 183 de la nouvelle Constitution constituait une preuve, parmi bien d'autres, que le président de la République n'envisageait pas de se présenter à l'élection présidentielle de 2020. Mais, il ne faisait que donner de cet article sa propre lecture, en ayant conscience qu'elle pourrait être sujette à débat. La compréhension concurrente à cette lecture pourrait consister dans l'idée que l'article visé ne concerne pas la Constitution de la 2ème République abrogée, mais plutôt les lois prises pour son application, dès lors qu'elles ne lui sont pas contraires. Cette interprétation pourrait être corroborée par les termes utilisés dans la disposition visée, à savoir : «la législation en vigueur (…), l'intervention de nouveaux textes (…)». Comme on le voit, Cissé Ibrahim Bacongo n'a pas pu clore le débat, s'il a jamais eu cette prétention ou celle d'avoir dit quelque vérité axiomatique.

 

Droit d'expression. Au surplus, chaque citoyen ivoirien a le droit d'exprimer sa compréhension ou de donner son interprétation des dispositions de la Constitution, lorsqu'elles s'y prêtent, pourvu qu'il en ait les ressources intellectuelles, scientifiques et techniques, au risque d'ajouter à la cacophonie et au vacarme général. Plus encore, le débat intellectuel, notamment en régime démocratique, doit être mené avec humilité, dans le doute cartésien constant, en ayant l'esprit de partage et le sens de la nuan (...)

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