Bombardement de Bouaké, crise post-électorale : Un ex-détenu livre des secrets sur Ouattara, Gbagbo et Blé Goudé


Lorsqu’on évoque 2004, on se limite à Bouaké avec les soldats français tués, déplore le président de la Coalition ça suffit !
  • Source: L'Inter
  • Date: sam. 27 fév. 2016
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Les évènements de novembre 2004 refont l'actualité à la faveur d'une procédure réactivée par une juge française concernant le bombardement d'une base militaire à Bouaké. Roger Youan, aux côtés de quelques camarades, avait, à l'époque, conduit des manifestations de rue qui ont tourné au drame. L'inter l'a interrogé sur novembre 2004 et sur d'autres points de l'actualité.

Le dossier relatif au bombardement du camp militaire français de Bouaké connaît un rebondissement judiciaire. Vous qui avez vécu de près les évènements de 2004, quelle appréciation faites-vous des récents développements ?

L'armée française avait détruit la flotte ivoirienne suite au bombardement d'une de ses bases au cours de l'opération Dignité. Ce qui est frappant, c'est que les pilotes biélorusses qui étaient aux commandes des deux Sukhoï, ont réussi à filer. Je n'ai pas une maîtrise des questions militaires. Mais les pilotes biélorusses en question ont été filmés sur le tarmac de l'aéroport de Yamoussoukro. Ils n'ont pas été filmés par des soldats ivoiriens puisque l'aéroport était contrôlé par la base militaire française. Pourquoi n'a-t-on pas pris le temps d'arrêter ces pilotes à l'origine du bombardement du camp ? Quand on veut la vérité, on va au fond des choses. Je ne rentrerai pas dans certains détails mais  la résurgence de ce débat autour des événements de 2004 me fonde à évoquer la situation des victimes ivoiriennes. Parce qu'on ne parle pas, ou du moins, on ne parle plus de ces victimes. Lorsqu'on évoque 2004, on se limite à Bouaké avec les soldats français tués, il faudrait aussi se souvenir des civils tués et des autres victimes. Elles portent à vie des séquelles. J'ai des amis qui ont perdu la vie. A l'hôtel Ivoire, j'ai moi-même pris une balle.

 

Vous avez dirigé ce qui s'appelait « Collectif des patriotes victimes de Licorne ». Tel n'est plus le cas, aujourd'hui…

Ce n'est certainement plus le cas. Mais, cela n'exclut pas que je pose le problème des victimes de ces évènements douloureux, aujourd'hui, des laissés pour compte.

 

Voulez-vous insinuer que rien n'a été fait pour les victimes ?

Nous sommes reconnaissants qu'on ait été soigné. Mais pour les faits vécus, se limiter aux soins n'est pas acceptable. La responsabilité de l'Etat de Côte d'Ivoire doit être assumée pleinement. A côté, il y a la responsabilité de l'Etat français. Parce que, quand les officiels français disent que l'ordre d'abattre les avions est venu de Paris, cela induit que les évènements à venir sont la suite de l'ordre donné. Pendant les manifestations, les gens n'étaient pas armés. Et pour maîtriser une foule aux mains nues, ce n'est pas des armes de guerre qu'on utilise. Je considère ce qui s'est passé en 2004 comme du terrorisme d'Etat. Les victimes ont besoin de réparation. Des pères de familles sont devenus, pour ainsi dire, des sous-hommes, des élèves ont dû arrêter les cours. Je ne demande pas que nous allions forcément en justice. Mais, il faudrait, sur la base des liens entre la France et la Côte d'Ivoire, trouver le bon compromis au profit des victimes. Dois-je rappeler que les entreprises françaises qui ont été détruites en 2004 ont été indemnisées et reconstruites par l'Etat de Côte d'Ivoire. Pourquoi en retour l'Etat français n'assume pas sa responsabilité en indemnisant toutes les victimes faites par ses soldats ? Pourquoi ? Cela est inacceptable.

 

Vous avez séjourné en prison autour de 2008. Certains de vos compagnons vous ont, par ailleurs, accusé de mauvaise gestion à la tête du Collectif. Sont-ce les déboires qui vous ont amené à quitter le camp Gbagbo pour le camp Ouattara ?

Non, pas du tout ! Pour ce qui est de la mauvaise gestion supposée, je citerai le dicton : lorsqu'on veut tuer son chien, on l'accuse de rage. Personne ne dira que j'ai fait une mauvaise gestion à la tête du Collectif. En ce qui concerne la prison, c'était une toute autre épreuve. Quand vous êtes écroué à la Maca, pour atteinte à la sûreté de l'Etat et qu'une fois, en prison, le délit se commue en vol de nuit en réunion à main armée, il y a bien un problème. Plus tard, ceux qui ont planifié pour vous jeter en prison, se tapent la poitrine, en lançant : « C'est nous qui l'avons envoyé en prison. S'il n'y prend garde, il va y retourner ». Je n'avais pas en 2010, le choix entre le bien et le mal. J'avais le choix entre le mal et le moindre mal. Je ne connaissais pas Alassane Ouattara. Je ne l'avais jamais approché. Des amis ont estimé que je pouvais apporter quelque chose à sa campagne. J'ai épluché son programme. J'ai trouvé qu'il était réalisable. Je me suis alors impliqué dans la campagne, de façon délibérée. J'ai estimé qu'il fallait donner à la Côte d'Ivoire, une seconde chance. Aujourd'hui, je dirige un mouvement citoyen de pression politique. Pour moi, il faut des personnes capables de dire les choses même quand elles peuvent gêner.

 

Quelle analyse faites-vous du procès ouvert à la Cpi contre l'ancien président ivoirien et l'ex-leader des jeunes patriotes ?

Lorsqu'on a assumé des charges au sommet de l'Etat et qu'il s'est passé tout ce qu'on a vu, on ne saurait dire qu'on n'a pas de responsabilité. Il faut qu'en Afrique, on apprenne à assumer les responsabilités. Généralement, les gens sont chefs de tout et responsable de rien. Cela dit, la responsabilité est collective. Que ce soit le pouvoir ou l'opposition de l'époque. Tous ont des responsabilités. On se limite souvent à la crise post-électorale en oubliant la succession de crises que le pays a connue. La crise post-électorale est la goutte d'eau qui a fait déborder le vase. Concernant Gbagbo et Blé Goudé, je souhaite  la manifestation de la vérité. Le rôle de la Cpi est d'aider le pays à tourner définitivement la page de la violence politique. Au sortir de la crise, j'avais fait ces deux propositions. Soit, on confie notre sort à la justice. Elle fait son travail pour tout le monde. Soit, on dit : dans cette affaire, nous avons tous failli, on va sous l'arbre à palabres pour solder nos comptes.

 

Etes-vous d'avis avec ceux qui disent que Laure (...)

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