Banny : « J'avais proposé une candidature unique RDR-PDCI en 2010, Ouattara avait refusé d'aborder la question » - « Ouattara ne conçoit l'amitié qu'en termes de soumission » - « Gbagbo est pour le changement, et il considère que la CNC est une bonne chose »


Banny n'a pas été tendre avec Alassane Ouattara. (Photo d'archives)
  • Source: Soir Info
  • Date: mer. 17 juin 2015
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Parce que, à 72 ans, il n'aura pas d'autre occasion de se présenter et qu'il est convaincu de pouvoir l'emporter, l'ancien Premier ministre a décidé de faire fi de la consigne de son parti, le Pdci, et de briguer la présidence en octobre.

Cette fois, c'est sûr. Après avoir longtemps hésité, Charles Konan Banny a finalement décidé de passer outre la consigne de son camp, le Parti démocratique de Côte d'Ivoire (Pdci), d'aller contre la parole du chef, Henri Konan Bédié, et de se présenter à la présidentielle d'octobre face à Alassane Ouattara.

L'ancien gouverneur de la Banque centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Bceao), devenu Premier ministre sous Laurent Gbagbo (de 2005 à 2007), puis nommé en 2011 à la tête de la Commission dialogue, vérité et réconciliation (Cdvr) par le président Ouattara, y pense pourtant depuis un moment.

Alors pourquoi maintenant ? Parce que, à 72 ans, il n'aura pas d'autre occasion de briguer la magistrature suprême. Mais aussi parce que le fait que Bédié ait décidé que le Pdci ne présenterait aucun candidat face à Ouattara est « inacceptable» pour cet amateur de rugby issu d'une grande famille baoulé du centre de la Côte d'Ivoire. Alors que Ouattara, investi par le Rassemblement des républicains (Rdr), le 25 avril, entend l'emporter dès le premier tour, Konan Banny veut croire en ses chances. Il espère rassembler autour de lui les opposants au président sortant et prendre la tête de la toute nouvelle Coalition nationale pour le changement (Cnc), qui rassemble notamment les frondeurs du Pdci.

Pédagogue, pointilleux, directif et parfois même volontairement cassant, Charles Konan Banny a répondu à toutes nos questions. Sur l'avenir du Pdci, son travail à la tête de la Cdvr, ses relations avec Alassane Ouattara, Laurent Gbagbo et Guillaume Soro ... Plus de deux heures d'entretien qu'il conclura par un : « A bientôt, au Palais ! »

 

Jeune Afrique : Que reprochez-vous exactement à « l'appel de Daoukro », par lequel Henri Konan Bédié a demandé au PDCI de soutenir la candidature d'Alassane Ouattara à la prochaine présidentielle ?

Charles Konan Banny : C'est un coup de force inacceptable ! Le congrès et le bureau politique du parti avaient décidé, en 2013, qu'un militant actif du Pdci serait candidat en 2015. Quelle ne fut pas notre surprise lorsque, au cours d'une visite du président de la République dans sa région, M. Bédié a décidé, seul, que nous ne présenterions finalement personne ! En tant que démocrate, je ne peux pas accepter de telles méthodes. A ceux qui ont la mémoire courte, je rappelle que j'avais proposé une candidature unique Rdr-Pdci en 2010. Alassane Ouattara avait refusé même d'aborder la question. Pourquoi ce qui était inconcevable il y a cinq ans est aujourd'hui considéré comme génial ? C'est simple : parce qu'en 2015, cette alliance profite incontestablement à Ouattara.

 

N'y a-t-il pas un risque que le Pdci implose ?

Le parti n'implosera pas. Tout simplement parce que la plupart des militants ont la même vision de « l'appel de Daoukro » que moi. Et puis ce parti, j'y tiens. II n'y aura pas de schisme, en tout cas pas de mon fait.

 

Depuis l'annonce de votre candidature, vous avez multiplié les rencontres avec les chefs traditionnels, dont le rôle est crucial au sein du Pdci

Ce sont des clichés ! En Côte d'Ivoire, comme ailleurs, ce sont les militants qui comptent. Il n'y a pas de grands électeurs donnant des consignes de vote qui seraient respectées à la lettre. Je ne dis pas que les chefs traditionnels sont dépourvus d'influence. Ils en ont. Simplement, celle-ci décroit de plus en plus. Aujourd'hui, aller les voir avant de prendre une grande décision, c'est une tradition, cela fait partie de notre éducation.

 

Avez-vous malgré tout sollicité leur soutien ?

Non, je leur ai demandé leur bénédiction. Encore une fois, je ne suis pas de ceux qui pensent qu'il suffit d'avoir des chefs traditionnels dans la poche pour être élu. Dans ma région, quand vous allez les voir, ils vous disent toujours : « Nous avons compris. » Mais ce qu'ils ont compris, vous ne le savez que le jour du vote !

 

La Cnc, dont vous faites partie, aura-t-elle un candidat unique ?

Pour battre Ouattara, je préférerais qu'il n'y en ait qu'un, mais rien n'est décidé.

 

Accepteriez-vous de ne pas être ce candidat unique?

Pourquoi voulez-vous que ce soit quelqu'un d'autre ?

 

Le représentant d'Amara Essy n'a pas signé la charte de la Cnc, le 15 mai. Pensez-vous que ce dernier rejoindra réellement la coalition ?

On est venu ici pour parler de Charles Konan Banny, pas des autres. Pour le reste, Amara Essy est un ami, et le fait que son représentant n'ait pas signé est un détail.

 

On vous a dit proche, puis brouillé avec Kouadio Konan Bertin, un autre membre de la Cnc. Quelles relations entretenez-vous aujourd'hui ?

C'est mon fils. Nous sommes ensemble.

 

Comment allez-vous financer votre campagne sans les structures et les ressources du Pdci ?

L'argent ne remplace pas les volontés. Oui, bien sûr, il faut de l'argent pour acheter de l'essence, par exemple. Mais si nous n'avons pas d'essence, alors nous marcherons ... Pour aller aux élections, il faut mobiliser des moyens, c'est-à-dire les hommes.

 

Vous connaissez Alassane Ouattara depuis longtemps. Que pensez-vous de ce premier quinquennat ?

J'avais fait campagne pour lui au second tour de l'élection de 2010. J'étais l'un des rares à pouvoir le faire dans le centre de la Côte d'Ivoire. Si j'avais fait campagne pour Gbagbo dans cette région-là, Gbagbo aurait été élu. J'en suis certain. J'ai donc contribué à la victoire de Ouattara. Je l'ai cru lorsqu'il disait vouloir rassembler les Ivoiriens, les réconcilier. J'ai cru qu'il était sincère. Une fois élu, il m'a proposé de conduire la Cdvr. J'ai hésité et j'ai accepté, bien que beaucoup m'aient dit que c'était un piège. Mais je connaissais Ouattara depuis les années 1970, c'était un ami et je pensais que nous partagions les mêmes valeurs : la démocratie, le respect de la chose publique ... Je pensais qu'il allait rompre avec des pratiques d'un autre âge. Cela n'a pas été le cas.

 

De quelles pratiques parlez-vous ?

Les libertés publiques, par exemple, ne sont pas une préoccupation pour lui : au surlendemain de l'annonce de ma candidature à la présidentielle, en décembre dernier, trois personnes de mon entourage ont été embastillées. C'est insupportable ! Cela prouve encore une fois qu'Alassane Ouattara ne conçoit l'amitié qu'en termes de soumission. Moi l'amitié (...)



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