Appel de Daoukro, relations avec le pouvoir : En colère, Tiburce Koffi lâche une autre bombe - Sa lettre de vérité au président Ouattara


(Photo d'archives)
  • Source: L'Inter
  • Date: mar. 03 mars 2015
  • Visites: 7040
  • Commentaires: 1
Dans une lettre ouverte au ton incisif adressée au chef de l'Etat, le président Alassane Ouattara, et dont copie nous est parvenue hier, l'écrivain et dramaturge Tiburce Koffi dénonce l'implication de sa famille dans ses prises de position politique. Ci-dessous de larges extraits de cette lettre.

Appel de Daoukro : lettre ouverte de Tiburce Koffi

A Son Excellence Monsieur le Président

Alassane Ouattara

 

Je voudrais vous le dire franchement, Son Excellence Monsieur le président de la République de Côte d'Ivoire, mon pays : j'aurais voulu m'éviter cette triple peine, au sens physique, intellectuel et moral, de vous adresser ce courrier qui plus, est offert à la curiosité du public. (…)J'aurais vraiment voulu que les choses se passent autrement cette fois-ci, entre une haute personnalité de mon pays et moi ; surtout entre vous et moi. Et vous savez pourquoi, M le président.

Permettez cependant que je ne révèle pas cela aux Ivoiriens : dans l'éthique du relationnel, il n'est pas nécessaire de tout ‘‘déballer'' sur la place publique dès qu'apparaissent des désaccords, aussi profonds soient-ils. Au contraire : parce qu'il y a toujours place pour le dialogue entre ceux qui sont dotés d'intelligence, parce que rien n'est impossible entre des être humains raisonnables et éduqués à des valeurs éthiques et spirituelles immuables, je reste convaincu que la route n'est pas totalement fermée – elle ne peut même l'être – entre vous et moi.

Vous savez très bien ce qui m'amène à vous, ce matin ; l'opinion ivoirienne, de même : les effets de ce qu'il est désormais convenu d'appeler « L'Appel de Daoukro. » Pour avoir dit « Non » à cet énigmatique appel lancé, non pas par le chef de l'Etat ivoirien que vous êtes, ni par aucune structure administrative de nature étatique, mais par Henri Konan Bédié, « un fils de l'Iffou » (c'est comme cela qu'il a signé cet appel), vous avez jugé bon de me limoger de mon poste.

Soyez-en sûr, SEM le président, je n'en fais pas un malheur. Et vous savez bien pourquoi : Jamais je n'ai sollicité ce poste. C'est bien plutôt vous qui aviez envoyé un de vos ministres me demander d'accepter d'aller redresser l'Insaac alors en chute libre. Et vous savez le sacrifice que j'ai fait en acceptant ce poste qui ne m'apportait vraiment rien, ni au plan financier, ni au plan de mon cursus administratif, ni même intellectuellement. Je l'ai fait par respect pour vous et en toute conscience citoyenne : accepter de servir partout où mon pays a besoin de moi. Le président Houphouët-Boigny nous a dit : On peut servir à tous les postes ; pourvu qu'on y mette du sien. Et c'est ce que j'ai fait, SEM le président, sans attendre aucune retombée pécuniaire que ce soit, des efforts que j'ai investis à l'Insaac. Vous avez eu des échos de ce travail.

SEM le président, souvenez-vous des conditions de ma nomination : c'est vous qui avez demandé que je renonce à aller professer aux Usa, et que je reste ici, en Côte d'Ivoire, pour servir le pays. C'est encore vous qui avez dit ceci, quand on vous a informé que j'y allais pour être près de ma famille et surtout, pour m'occuper de ma fille, étudiante : Dites à Tiburce Koffi que je prendrai en charge les études de sa fille. Pour le moment, j'ai besoin de lui, à l'Insaac. Alors, j'ai obtempéré.

SEM le Président, c'est avec beaucoup de peine que je rappelle tout cela, et que je porte aujourd'hui ces choses, qui devaient rester confidentielles, à la connaissance du public.

Pour mon malheur aussi bien que pour mon bonheur, je suis, comme vous, un personnage public. A la fois détesté et aimé, vilipendé et loué, offensé et honoré, souvent jalousé, je porte sur moi le destin tourmenté de tous ceux à qui, comme vous et moi, Dieu a donné le lourd privilège de sortir de l'anonymat. Vous comprenez donc que je sois attentif et sensible à tout ce qui touche à mon vécu social quotidien, mais plus encore, à ma vie solitaire, privée, d'essence familiale. Mon épouse et mes enfants n'appartiennent pas à mon univers intellectuel, administratif et politique qui, lui, est ouvert au public. C'est comme cela que j'ai décidé de les protéger. Or, depuis 2013, vous avez posé, ou autorisé que soient posés à mon encontre, des actes qui, selon moi, relèvent de l'ordre de la transgression éthique et de l'intrusion dans ma vie familiale.

 

Injustices, méchancetés et contrevérité

Je passe outre mon limogeage qui ne se justifie pas. Je signe et je persiste : je n'ai commis aucune faute administrative. Dire « Non » à Monsieur Henri Konan Bédié et ‘‘son'' (...) appel de Daoukro ne peut pas être une faute administrative, vous le savez bien, puisque cette déclaration n'est pas un acte administratif. C'est une affaire privée qui, dans son essence, ne concerne pas l'Etat de Côte d'Ivoire. C'est un acte solitaire, non étatique et dont l'applicabilité même n'est pas évidente : les remous, d'essence conflictuelle, qu'il provoque en ce moment au sein de la classe politique, nous prouvent suffisamment que c'est un appel inadapté au contexte socio politique actuel de notre pays qui n'avait pas besoin de cela.

(…)

SEM le président, j'ai toujours pris la précaution, jusque-là, de vous innocenter des scélératesses administratives, politiques et médiatiques que je subis de la part de certains de vos collaborateurs. J'en ai énumérées quelques-unes dans mon livre « Non à l'Appel de Daoukro », notamment la censure dont mon petit frère Michel Koffi (ex-rédacteur en chef) et moi, avons été et sommes encore victimes à Fraternité Matin où, sous des recommandations d'origines obscures, nous sommes interdits de publier quelque article que ce soit ! Je ne peux pas ne pas signaler à l'opinion d'autres actes, aussi mesquins les uns que les autres, qui ont frappé des membres de ma famille et d'autres personnes, des amis -, coupables d'être proches de moi. J'ai toujours estimé que vous n'êtes mêlé ni de près ni de loin à ces actes étranges et immoraux.

Dans chacune des nombreuses interviews que j'ai données ici, à l'étranger où je suis en ce moment, j'ai toujours pris la peine de ménager au fond de mon cœur et dans mes propos, une parcelle importante du respect et de l'admiration que, pour des raisons que j'ignore moi-même, je continue d'éprouver pour vous, malgré tout. Oui, SEM le président, je vous respecte et je veux continuer à vous respecter. Parce que je reste convaincu que vous êtes un digne fils de ce pays et de ce continent qui a besoin de figures de référence, des modèles à transmettre à ceux de demain. La conférence, qu'en septembre 2010, j'ai prononcée au QG de votre parti, en zone 4, porte d'ailleurs les marques de ce respect et de cette admiration sincères. 

(...)

 

Inacceptables transgressions

La tournure médiatique que prennent les réactions de certains de vos collaborateurs et parents, relative à mon refus de l'Appel de Daoukro, m'inquiètent. Votre Conseiller Touré Mamadou, qui se trouve être votre neveu, m'a offensé gravement lors d'un meeting en me traitant d'ingrat, pour le fait que j'aie dit Non à l'Appel de Daoukro. Stupéfiant ! Il donne ensuite, et publiquement, une information pour le moins curieuse : j'apprends en effet, de lui, que c'est vous qui payez les études de ma fille, étudiante aux Usa. Admettons même un seul instant que cela soit avéré. Où est le rapport entre mon refus de l'Appel de Daoukro, et le fait que vous assumeriez l'école de ma fille ? Est-ce vous qui avez écrit l'Appel de Daoukro ? Vous appelez-vous Henri Konan Bédié ?

Ensuite, vous savez bien que tout cela est faux, SEM le président. Vous savez bien que je ne vous ai jamais demandé de payer l'école de ma fille. Et les services de la Présidence savent que jamais ils n'ont payé les études de ma fille. Pourquoi donc, aucun de ces services ne fait-il un démenti aux propos non vrais, voire mensongers, de votre neveu ?

(...) Vous savez très bien que ceci est une forme de harcèlement psychologique et de terrorisme, M. le président. Ma fille a désormais peur pour sa sécurité, sait-on jamais ! (…) Je m'interdis ici de proférer à votre encontre, des propos déplacés, parce que vous êtes l'aîné, le chef et le père actuel de notre pays. Aidez-moi à continuer de vous respecter.

Non, Monsieur Alassane Ouattara, votre neveu et vos journaux n'ont pas le droit de me traiter d'ingrat, parce que vous savez très bien que je ne vous dois rien. Bien au contraire, c'est vous qui avez bénéficié de mon engagement politique à soutenir votre combat. Toute la Côte d'Ivoire sait que j'ai mis mon nom, ma plume, ma voix, mon image de marque, la petite parcelle de notoriété intellectuelle et de sympathie publique que je me suis bâtie au prix de dizaines d'années d'efforts intellectuels et moraux, au service de la lutte du Rhdp, et à défendre votre cause. C'est encore vous qui aviez demandé que ma fille vous fasse parvenir son dossier ; ce n'est pas moi qui vous ai sollicité.

 

Attentes vaines !

De vous, je n'attendais rien d'autre que le respect des engagements que vous aviez pris, de ressouder le tissu social et relationnel de notre pays mis à mal par des politiques maladroites - (...) A titre personnel, je n'attendais rien d'autre de vous qu'un peu d'égards, et un espace de liberté d'expression pour les intellectuels et les créateurs de ce pays. Je vous rappelle, à cet effet, ce que vous avez écrit dans votre projet de société qui m'avait séduit et convaincu que vous étiez la « Solution ». A la page 8 de votre Programme de société, précisément au chapitre II (Construisons une démocratie de tolérance et d'efficacité), vous aviez écrit ceci : « (…) rien de durable ne pourra être accompli si nous ne réussissons pas d'abord notre démocratie, si nous ne parvenons pas à faire primer les débats d'idées sur les querelles partisanes. (Ecrit en gras) ».

M. le président, dès que j'ai engagé le débat d'idées, vous m'avez viré de mon poste ! (...) Avoir été le Premier ministre de M. Félix Houphouët-Boigny ne fait pas forcément de vous, un vrai disciple de cet homme. Sur cette question, je me suis trompé sur votre compte.

Le président Houphouët-Boigny avait de l'admiration pour les contestataires de son régime. Bernard Zadi, Laurent Gbagbo, Dé (...)

Lire la suite sur L'Inter


Côte d'Ivoire service don lutte projet Program sein fonds écrivain livre Félix Houphouët-Boigny Henri Konan Bédié Laurent Gbagbo Alassane Ouattara Touré Mamadou Tiburce Koffi interviews Rhdp Daoukro terrorisme information Ivoirien essence Excellence




Educarriere sur Facebook

Offres d'emploi du jour